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Revue de presse : Article sur www.cafepedagogique.net du 04/03/2014 : Maternelle : Une réforme qui rompt avec 2008

A quoi ressembleront les nouveaux programmes de maternelle ? S'il est encore trop tôt pour avoir des certitudes, les premiers échanges entre les syndicats et l'Ageem (association des professeurs de maternelle) et le Groupe de travail du Conseil supérieur des programmes donnent à penser que les programmes de 2014 seront bien en rupture avec ceux de 2008. Pour autant ce ne sera pas le retour aux programmes de 2002.

 

Les programmes de maternelle seront les premiers proposés par le Conseil supérieur des programmes (CSP). Selon le calendrier récemment revu par Vincent Peillon et Alain Boissinot, président du CSP, les textes devraient être prêts fin mai 2014. Mais une première présentation des projets du CSP a été faite le 27 février par groupe de travail maternelle. Y siègent Pascale Garnier, coordinatrice, professeure à Paris 13, Mireille Brigaudiot, chercheure, Michel Fayol, professeur à l'université Blaise Pascal de Clermont-Ferrand, Christine Passerieux du Gfen, Isabelle Racoffier présidente de l'Ageem, deux directeurs d'école maternelle, un conseiller pédagogique et une inspectrice. A terme les futurs programmes seront mis en consultation auprès des enseignants avant d'entrer en vigueur à la rentrée 2015.

 

A l'origine de ces nouveaux textes le rapport de l'Inspection générale de 2012, fort critique sur les programmes de 2008. Le rapport dénonçait les dégâts de la réforme Darcos accusée d'avoir "primarisé" l'école maternelle. Ce sont "les enfants les plus défavorisés, les plus vulnérables, qui ont le plus à pâtir d’exigences prématurées", notait-il. Pour le rapport, il fallait inverser la logique des programmes de 2008 et partir du développement de l’enfant, et non pas des objectifs de l’élémentaire. Pour que chaque enfant puisse "devenir élève", c’est à dire entrer dans un processus d’apprentissage scolaire, il faut accepter qu’il ne le soit pas encore, et créer les conditions adéquates : faire observer, imiter, répéter, imaginer, chercher des réponses, jouer.

 

Rupture ou continuité ?

"Globalement il y a une vraie volonté de donner corps au rapport de l'Inspection générale", nous a confié Stéphanie Valmaggia, déléguée nationale du Se-Unsa. "Les propositions provisoires du groupe de travail veulent redonner à l'école maternelle sa spécificité. Il y a la volonté de ne pas primariser les apprentissages en maternelle, de redonner au corps sa place. Il n'y a plus la volonté de dresser le futur élève comme on le sentait dans les programmes de 2008. On n'essaie pas de faire un petit élève d'école élémentaire dès la maternelle.

Même si elle juge que c'est trop tôt pour trancher, puisque le groupe de travail ne présente pour le moment que des réflexions provisoires, Isabelle Racoffier, présidente de l'association des professeurs de maternelle, juge que celles-ci rompent avec l'esprit des programmes de 2008. "Les programmes de 2008 anticipaient les apprentissages et cela se faisait aux dépens des enfants les plus fragiles. Finalement à vouloir scolariser trop tôt on obtenait des résulats inverses à ceux recherchés". Pour le Snuipp, Sébastien Sihr, secrétaire général, accueille aussi avec plaisir une rupture avec les programmes de 2008. "Il faut retrouver un équilibre perdu en 2008", nous dit-il, "entre l'épanouissement de l'enfant et les activités d'entrainement qui restent nécessaires. Les futurs programmes devraient remettre de la coopération, du vivre ensemble, de la bienveillance, être plus attentifs aux plus fragiles".

 

Un redécoupage des domaines d'enseignement

Selon S Valmaggia, les nouveaux textes devraient découper en deux le domaine "découvrir le monde" pour inscrire d'un côté les maths et le temps et l'espace et de l'autre une découverte des sciences et des techniques. La question du langage, qui avait tant été mobilisée dans les programmes de 2008 qui instauraient un apprentissage systématique du vocabulaire, est totalement revue. Certes on continue à enseigner le principe alphabétique. Mais on accorde plus de place à l'oral et à une découverte progressive de l'écrit. "Le langage est bien une priorité en maternelle", rappelle S. Sihr, "elle est réaffirmée. Mais les programmes vont faire place à la littérature jeunesse et appuyer le langage sur des activités quotidiennes. Le travail phonologique et le principe alphabétique continuent à se faire à l'école mais en encadrant leur place pour qu'elle ne soit pas surdimensionnée".

 

Préparer un petit citoyen

"Les programmes ont aussi une volonté de travailler davantage sur l'ouverture à la diversité linguistique et culturelle", note S Valmaggia. "Ils considèrent l'enfant comme une personne en devenir. Ils veulent ouvrir l'enfant aux différences culturelles, à l'accueil du handicap ou aux différences filles garçons. Le tout forme un projet de société intéressant". Isabelle Racoffier est aussi sensible à cette dimension. "Les programmes posent aussi des enjeux démocratiques", estime-t-elle. "Il faut que dans la nouvelle école maternelle tout le monde ait sa place. Sur ce point on est bien dans la rupture avec 2008". 

 

Mais comment faire ?

Mais comment faire passer ces amitieux objectifs des textes à la réalité ? "Il faudra des documents d'accompagnement", estime S Valmaggia. "Il faudra que la nouvelle philosophie de ces programmes apparaisse clairement, que les programmes soient interactifs et pas trop longs". Au Se Unsa on verrait bien des documents numériques interactifs permettant une appropriation plus rapide par les enseignants. Isabelle Racoffier est plus réservée sur le numérique. "Il faut une formation en Espe avec des questions aux concours", dit-elle. "En formation initiale ou continue, le numérique ne va pas suffire", dit-elle. "Il faut un aller retour avec le terrain, une analyse des pratiques avec des professionnels. On ne peut pas apprendre à organiser une classe de GS simplement avec une vidéo. Il faut le vivre. Il faut donc de la formation continue, du temps pour que les enseignants puissent échanger". C'est aussi le souci de Sébastien Sihr. "Il va falloir concrétiser ces recommandations. On ne changera pas l'école si on ne développe pas la formation continue. M@gistère ne peut pas suffire. Il va falloir recréer un vivier de formateurs et que les enseignants puissent bénéficier de plans départementaux de formation". Si la philosophie des nouveaux programmes semble faire l'unanimité, la question de leur accompagnement n'a pas fini de faire parler d'elle. Là aussi c'est la rupture avec la sécheresse des instructions de 2008. La nostalgie des documents d'accompagnement de 2002 reste dans les mémoires.

 

François Jarraud

 

Rapport de l'Inspection générale de 2012



18/03/2014
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