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Revue de presse : Article sur www.cafepedagogique.net du 04/09/2012 : Pré-rentrée : A la Goutte d’or, comment l’école se remobilise...

Que peuvent bien faire des professeurs des écoles durant la journée de pré-rentrée ? Quel est leur état d’esprit face à la « refondation » de V. Peillon ? Quelles sont leurs attentes ? A l’école de la rue d’Oran, dans le 18ème arrondissement de Paris, la rentrée se prépare sérieusement mais sans illusions…

 

10 heures. Autour d’une grande table, la directrice, Véronique Bavière, 9 professeurs des écoles, une enseignante de Rased. La moyenne d’âge est en dessous de 30 ans. Dans cette école Eclair située dans un quartier très populaire de la capitale, les enseignantes sont en début de carrière. Une professeure débute sa seconde année d'enseignement. Elle fait partie des nouveaux enseignants lâchés sur le terrain sans formation par Luc Chatel. L’école compte 8 classes avec 21 à 24 enfants par classe. Trois professeurs de la Ville de Paris, chargés de l’éducation artistique et physique, deux auxiliaires de vie scolaire (AVS) complètent l’effectif.

 

Les pieds sur terre

 

Ici on a les pieds sur terre, la tête dans les étoiles. Durant deux heures les enseignants et AVS vont préparer très concrètement la rentrée. Bien sûr, on commence par les documents officiels. Chacune découvre sa classe et certains noms sont déjà bien connus. Et parfois, en bien... Comment va-t-on accueillir les nouveaux CP dans la cour de récréation ? Que fait-on pour les enfants qui arrivent le ventre vide ? Comment les reconnait-on ? Ceux qui sont très sales ? Que fait-on en début d'année quand l'accompagnement éducatif ne commence qu'en octobre...

 

Il faut expliquer à Amélie, une enseignante venue d'une autre école parisienne, comment fonctionne l'école. Rue d'Oran l'équipe a construit ses outils pour apaiser le climat scolaire et motiver les élèves. On fonctionne par classes de cycles. "Cela permet de limiter les redoublements", explique V. Bavière, "mais aussi de travailler au plus près du niveau réel des enfants". C'est aussi encourager des relations d'entraide entre grands et petits. Pour les enseignantes c'est une autre façon de travailler. Mais sans complexe. "Je suis à l'aide en CM2 mais j'ai besoin d'aide pour le CM1" dit l'une. Aussitôt la collègue se propose pour un coup de main.

 

Pas de "ceintures" rue d'Oran, mais des "échelons" qui vont du nouvel élève à l'élève référent en passant par 5 échelons. Chaque échelon donne de nouveaux droits mais aussi des responsabilités. On gagne ses échelons avec l'accord du conseil d'enfants de la classe et du conseil des maîtres, chaque adulte de la maison disposant d'un droit de véto. Chaque professeur sait qui parmi ses élèves est "référent" ou "tuteur" ou "confirmé"...

 

Enfin il y a l'ARR, "l'atelier de réflexion et réparation", où sont invités les enfants dont le comportement laisse à désirer en dehors des heures de cours. Avec des adultes l'enfant doit s'expliquer et obtenir réparation. L'ARR est aussi un bon indicateur des tensions. Ses statistiques sont épluchées. "Il y a les dérapages des enfants", dit la directrice, "mais il y a les notres aussi" constate-elle quand les chiffres flambent à la fin de l'hiver. Finalement l'ARR ne sert pas qu'à la formation des  enfants.

 

Vers 11h30 arrive la question des parents. "Surtout pas d'injonction envers les parents" rappelle la directrice. Mais comment les associer davantage à la vie de l'école ? Les enseignantes échangent sur ce qui a été réalisé l'année dernière avec plus ou moins de succès. Rue d'Oran on a des trucs pour que les parents démarrent la journée à l'école ou viennent la terminer. On sait comment positiver les problèmes rencontrés dans un quartier très défavorisé.

 

La tête dans les étoiles

 

Pour ceux qui rêvent d'établir de vrais chefs d'établissement dans les écoles, la visite rue d'Oran est intéressante. Il y a bien une directrice qui est écoutée. Mais comme il n'y a pas de supérieur hiérarchique, la discussion autour de la table est suffisamment libre pour que les faiblesses et les difficultés soient dites. Au final ça permet d'avancer et de trouver des solutions plus facilement. L'ambiance est à la confiance. Essayez de trouver cela dans le secondaire...

 

Et puis on discute pédagogie. Sur la table un grand classeur où chacun classe les articles intéressants qu'il a trouvé. On réfléchit au projet éducatif de l'année. L'école est engagée dans un projet de partage de pratiques.

 

Quelle refondation ?

 

Que pensent ces enseignantes si impliquées de la refondation lancée par V. Peillon ? Pas grand chose. Pourtant il y a des attentes. "On aurait bien besoin d'une formation à l'interculturel" souligne une enseignante. "On ferait moins d'erreurs". Tout le monde acquiesce. Tout le monde attend aussi une revalorisation du métier. Mais la revalorisation financière divise. Ce qu'on veut surtout c'est de l'oxygène pour l'école. "On est habitué à gérer la pénurie. On a besoin de temps de concertation". "Il faudrait plus de professeurs que de classes", poursuit une autre. "Je suis persuadée qu'avec une formation ce serait efficace". "On a besoin de matériel informatique pour enseigner avec des outils modernes", demande une troisième enseignante.

 

"Il faudrait aussi lutter contre les ghettos. Quelle que soit l'énergie que nous dépensons, avoir 13 élèves sur 21 très défavorisés tire le niveau vers le bas", poursuit une autre enseignante. "On est toujours déçues des résultats de nos efforts". Rue d'Oran aussi la tâche parait parfois immense.

 

François Jarraud



04/09/2012
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