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Revue de presse : Article sur www.cafepedagogique.net du 10/06/2015 : Primaire : Quatre instits en fin d'année. Verbatim

Quel bilan les professeurs des écoles font-ils de cette année ? Réunis par le Café pédagogique, quatre professeurs des écoles échangent librement sur ce qui a marqué l'année. Mais plus que le bilan c'est la perspective qui les anime : celle de l'après 2017 déjà fortement présente dans les esprits. Faut-il déjà mettre la refondation au passé ? Micheline, Julie, Valérie, Daniel : à eux quatre ils cumulent entre 50 et 60 années d'enseignement. Daniel enseigne en élémentaire dans un quartier mixte socialement. Micheline, Julie et Valérie sont en maternelle. Valérie enseigne en éducation prioritaire. Tous quatre ont été rencontrés lors de l'université  de printemps du Snuipp Paris.

 

La ségrégation commence en GS

"La ségrégation sociale ça commence déjà en GS (grande section de maternelle) explique Julie, en écho au colloque du Cnesco qui a eu lieu les 5 et 6 juin. "Les familles viennent me voir en fin d'année pour choisir l'école élémentaire. Certaines déménagent pour être dans un "bon quartier". Micheline connait aussi cela : "les familles développent des stratégies : avoir la meilleure école pour avoir le meilleur collège et le meilleur lycée". "Je vois des enseignants faire de même", explique Julie. "On se demande si on peut laisser son enfant à l'école du quartier quand on voit comment ça se dégrade". Valérie réagit vivement contre "l'individualisation de la société" elle qui a mis sa fille dans une ecole très populaire. "Les écarts c'est surtout faute de moyens", souligne-t-elle. "Dans les écoles populaires il faut des équipes très soudées et solides", explique Daniel, "beaucoup plus que dans les écoles des quartiers favorisés". Lui voit dans son école parisienne arriver des enfants de Montreuil. Il voit aussi des parents partir en réaction à la pédagogie. Des parents cherchent des pédagogies Freinet ou Montessori.

 

Avoir moins d'élèves c'est plus de réussite

Les moyens font partie du bilan de cette année alors que se décident les dotations de la rentrée. "Sur Paris, il y a des fermetures de classes. C'est vrai que dans mon école on a de petits effectifs. Dans ma classe de GS j'ai 18 élèves. Mais c'est le bonheur ! Tous même les non francophones sont entrés dans la lecture. On a un enfant qui a des troubles graves. Malgré tout cela on est heureux".

"J'ai 27 élèves. Beaucoup ont un niveau faible. J'ai 4 enfants avec des troubles importants et avec ça il faut faire du langage. Mais comment y arriver ", interroge Micheline. Pour tous les professeurs présents la question du nombre d'élèves par classe ne se discute pas : en quartier prioritaire il ne devrait jamais dépasser 20 enfants.

 

Les nouveaux rythmes ont changé le métier

Les rythmes scolaires sont-ils acceptés ? "Inutile de tout chambouler", dit Julie. Mais il y a de l'amertume dans les paroles de ses collègues. "Les enfants sont fatigués le jeudi", dit Julie et ses collègues acquiescent. "Ils sont souvent à l'école jusqu'à 17 heures ça leur fait un temps trop long". Mais c'est aussi l'organisation des rythmes qui pose problème. Le calendrier parisien, avec des journées irrégulières, est rejeté. La question de la relation avec les animateurs est un autre problème. "Je vais à la bibliothèque avec les enfants, je leur présente un livre, ils me disent "on l'a vu avec Josselin. J'ai l'air d'une quiche", explique Julie. Micheline donne un autre exemple. "Il n'y a pas de coordination avec les animateurs", explique Daniel.

"Surtout ça a changé le métier", poursuit-il. "Comme le périscolaire fait des activités sportives et artistiques, les enseignants prennent l'habitude de ne plus les  faire en classe. Il se concentrent sur les fondamentaux, les maths , le français et ne font plus que cela. Or les enfants ont besoin de tout. Le temps scolaire devient lourd.

 

La refondation, une occasion déjà perdue

"Sur les rythmes scolaires on n'a pas été entendus", souligne Valérie. "Il y a de la déception car on a loupé une occasion. Le désir de changer l'école était sincère mais on est loin d'avoir fait ce qui aurait pu être fait". "On a peur du retour de baton en 2017", explique Daniel. "Le ministre s'est focalisé sur les rythmes et c'est un échec. Depuis on entend beaucoup d'idées. Mais  on ne voit rien sur le terrain". "On passe notre temps à justifier de ce qu'on fait  avec des cahiers journal, des projets qu'il faut taper. On se sent critiqués et mis en demeure de prouver en permanence ce qu'on fait", estime Micheline. "Dans nos classes on n'a plus le temps de laisser la vie de la classe s'installer. On est ligotés par des fiches de préparation", explique Daniel. "Finalement les meilleures séances c'est quand les enfants animent eux mêmes", conclue Julie.

 

Propos recueillis par François Jarraud



18/08/2015
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