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Revue de presse : Article sur www.cafepedagogique.net du 22/09/2014 : Scolarisation des moins de 3 ans : L'Education nationale marque le pas devant les difficultés

Alors que la loi d'orientation sur l'Ecole  a fait de la scolarisation des enfants de moins de trois ans un de ses objectifs majeurs, un rapport de l'Inspection générale montre que celle-ci marque le pas. En effet, la scolarisation des moins de trois ans nécessite des moyens matériels importants, du personnel spécialement formés, une bonne coordination entre l'Education nationale, ses partenaires et les parents. Toutes ces conditions sont difficiles à réunir. Le rapport montre aussi que l'Education nationale s'adresse trop peu aux parents qui ont le plus besoin de cette scolarisation, ceux des quartiers populaires.

 

 Selon la loi d'orientation, 3 000 des 54 000 nouveaux postes créés durant le quinquennat devraient être ciblés vers la scolarisation des moins de trois ans. Variable d'ajustement, la scolarisation des moins de trois ans a vivement régressé sous les présidences Chirac et Sarkozy passant d'un enfant sur trois à un enfant sur dix. En 2012 seulement 11% des enfants de moins de trois ans étaient scolarisés. En 2013, ce taux atteignait 11,8%, soit 6 000 enfants supplémentaires scolarisés. Grâce à quelques politiques volontaires, comme à Créteil, le taux est plus élevé en éducation prioritaire où il atteint 20%. Mais après 397 postes ouverts en 2013, la rentrée 2014 n'a vu que 262 emplois créés. Pour Gilles Pétreault et Marc Buissart, les directeurs du rapport, "les créations d'emplois marquent le pas". A ce rythme là la création des 3 000 postes nécessiterait deux quinquennats...

 

Les familles prioritaires souvent oubliées

 

Les freins ne sont pas que du côté de l'Education nationale. "La réponse aux besoins des très jeunes enfants demande des équipements spécifiques, des aménagements de l’espace, des matériels adaptés ainsi qu’un déroulement de la journée qui leur permette de bien vivre à l’école tout en faisant des apprentissages. Adapter la réponse scolaire usuelle engage la collectivité territoriale à supporter des dépenses d’investissement et de fonctionnement pour des locaux, des équipements et des emplois", note le rapport. L'achat de mobilier spécifique peut atteindre 10 000€. Ouvrir une classe particulière peut coûter 80 000 euros. Ces dépenses peuvent faire reculer une commune. "Pour les élus, l’ouverture d’une classe pour les moins de trois ans est perçue comme un investissement supérieur à celui des autres classes". Il s'interrogent sur la pérennité des choix de l'Education nationale...

 

Alors que la scolarisation des moins de trois ans est surtout profitable aux enfants des quartiers populaires, le rapport souligne que "la recherche des publics prioritaires (est) rarement réalisée". On privilégie les enfants les plus âgés plutôt que ceux qui ont le plus besoin de la scolarisation, explique le rapport. Il recommande un travail de repérage des familles pour qui la scolarisation serait la plus bénéfique en lien avec les assistantes maternelles et les crèches.

 

Un vrai défi pédagogique

 

La scolarisation des jeunes enfants est aussi un défi pédagogique. L'Inspection privilégie des classes spécifiques. "Une scolarisation de qualité pour les moins de trois ans demande de réunir de bonnes conditions concernant les locaux et les espaces extérieurs, suppose de s’appuyer sur des personnels compétents et ouverts aux parents, d’organiser une prise en charge continue des enfants et d’impliquer les partenaires. Dans les classes multiniveaux, l’organisation de la classe correspond en général surtout aux besoins des plus âgés. Les classes spécifiques ou dispositifs partenariaux sont mieux placés pour répondre à l’ensemble de ces conditions (rythmes de vie, organisation et adéquation des activités)", écrit le rapport. Le rapport détaille les domaines d'apprentissage. "Dans les entretiens, les enseignants montrent qu’ils s’attachent à des priorités bien identifiées. Tous se réfèrent à plusieurs domaines essentiels : le développement du langage, l’apprentissage du vivre ensemble par les interactions et en favorisant la capacité des enfants à construire des relations avec leurs pairs, ainsi que l’amélioration des capacités motrices à travers des propositions d’expériences (bouger, manipuler…) dans différents espaces, avec des objets et des jeux", écrit le rapport. "L’envie de venir à l’école et l’acquisition d’une posture d’élève figurent également parmi les priorités. La rencontre et la familiarisation des enfants avec les livres, leur usage en famille pour favoriser les échanges parents - enfants apparaissent aussi de façon fréquente tandis que certains évoquent le repérage des difficultés des élèves ou d’un handicap". Le rapport souligne qu'il y a "des spécificités pédagogiques à mieux cerner". Il pointe les "ateliers d'échange de pratiques" entre enseignants et même le blog d'une enseignante de l'Yonne ( http://maicresse.jimdo.com).

 

Le rapport souligne l'importance des ATSEM et de la relation avec les parents. L'Atsem joue "un rôle essentiel dans la vie des jeunes enfants". Elles ont une fonction éducative, particulièrement en terme de sécurité affective.

 

Priorité aux classes spécifiques

 

Dans les recommandations, le rapport interroge sur l'affectation prioritaire d'enseignants à mi-temps dans ces classes, les enfants étant souvent absents l'après-midi. Il recommande de favoriser les classes spécifiques et de développer des dispositifs de sensibilisation des familles prioritaires. Il recommande aussi de développer des formations à la pédagogie des moins de trois ans. On trouvera aussi dans le rapport des recommandation concernant directement l'équipe éducative : "les locaux et l’accès à des espaces extérieurs : les surfaces doivent être vastes, les fonctions pour la vie quotidienne (propreté, nourriture, sommeil) bien intégrées et facilement accessibles, les aménagements matériels adaptés pour que chacun puisse agir librement et en sécurité". Il lui resterait à faire des recommandations spécifiques aux familles populaires. Mais la scolarisation des moins de trois ans se heurte aussi parfois aux résistances des familles populaires. Elle se situe aussi au coeur de stratégies de conquêtes entre public et privé qui n'ont rien à voir avec les objectifs de la loi d'orientation. C'est ce qui explique, par exemple, un taux particulièrement élevé de scolarisation dans l'ouest et dans des zones non prioritaires. Là la puissance publique devrait ajuster ses moyens à ses objectifs.

 

François Jarraud

 

Le rapport



30/09/2014
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