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Revue de presse : Article sur www.cafepedagogique.net du 25/11/2015 : Le film de la semaine : « Dis, maitresse » de Jean-Paul Julliand

Comment convaincre les derniers sceptiques des multiples mérites éducatifs et citoyens de la scolarisation des enfants de moins de trois ans ? Loin des recherches théoriques et des querelles d’experts, le réalisateur Jean-Paul Julliand n’y va par quatre chemins. Pendant une année scolaire, il installe sa caméra discrète au sein d’une classe de l’école maternelle Anatole France dans le quartier des Minguettes à Vénissieux. Et l’attention bienveillante du documentariste-conjuguée à la patience méthodique de l’équipe pédagogique et à la confiance appuyée des familles- éclaire pour nous les premiers pas de ces tout-petits au sein de l’Ecole de la République. Une expérience exemplaire.

 

 

Diversités des origines, creuset commun

La chronique d’une année scolaire (ici 2012-2013) dans une maternelle d’un quartier populaire commence inévitablement par les premiers moments de séparation des petits d’avec leurs parents, même si certains sont incités à demeurer au sein de la classe le jour de la rentrée. Géraldine Pochard, la maîtresse, (et l’ATSEM, Aline Vaslet) d’emblée console, réconforte, trouve gestes et mots adaptés face aux cris, aux pleurs et autres manifestations d’inquiétude. L’attitude de l’enseignante, l’organisation de l’espace invitent d’entrée de jeu les petits de toutes les couleurs et les origines à surmonter leur timidité respective, à franchir les barrières, à passer de la crainte à l’audace. Nous saisissons rapidement les priorités de Géraldine : proposer à ses élèves des activités multiples et, dès que possible, les amener à nommer les choses et les situations vécues. Autrement dit, faire en sorte que le groupe se constitue à partir de la découverte de la langue française, inscrite dans le cadre de l’école.

 

Couleurs des jours, saisons des apprentissages

Tout concourt à construire du commun : stimuler les savoir-faire (dessins, danses, gâteaux), le savoir-être et vivre en groupe (jeux collectifs, événements festifs) et les rudiments d’apprentissage de la langue et des nombres premiers. Périodiquement, une couleur dominante imprime toutes les activités qui s’y rattachent. Ainsi le rouge, couleur des tee-shirts, est aussi celle du feu, des pompiers et de leur véhicule de secours. La sortie collective pour visiter la caserne permet des mises en situation (les enfants au volant du camion, la maîtresse portant le casque), qui, une fois photographiées, sont revisitées en classe : les enfants sont incités à les décrire, à trouver les mots pour raconter ce qu’ils ont vu et ressenti. Au fil des saisons et de l’avancée de l’année scolaire, un début de maîtrise de la langue et les progrès de la socialisation, nous voyons des individualités s’affirmer, des personnalités se dessiner, des êtres en devenir se constituer comme sujets.

Sans tambour ni trompettes, la méthode de la maîtresse fait appel à l’occasion aux autres collègues de l’école, notamment à l’occasion de la formation de ‘binômes’ d’élèves pour certaines créations collectives. La conception du spectacle de fin d’année (point culminant d’autres réalisations offertes aux parents, tel le goûter avec gâteaux fabriqués par les petits)   est à ce titre remarquable. Chaque classe de l’école, suivant son niveau, enrichit le spectacle, de la réalisation de panneaux peints décoratifs à la confection des costumes en passant par l’invention du conte joué et mis en scène : ‘un enfant quitte ses parents, rêve de devenir grand, rencontre en chemin plusieurs personnes qui lui expliquent que c’est à l’école qu’il va apprendre à devenir grand’.

 

Promesse de l’école républicaine

Filmé à hauteur d’enfant par un caméraman empathique, « Dis, maîtresse » n’est pourtant pas un conte à dormir debout. S’il capte les infinies ressources d’enfants dans leur richesse et leur diversité, il met surtout au jour l’humanité et les qualités pédagogiques de leur enseignante, son énergie généreuse, son inventivité tant dans les voies d’apprentissage proposées que dans l’interactivité avec les autres membres de l’équipe éducative ou dans la confiance générée avec les familles. Au moment où de graves dangers menacent l’unité de la République, la vision de cette pédagogie de l’intégration et de la citoyenneté, mise en œuvre dans une école maternelle de la République, touche au cœur. Avec modestie et patience, se construit, sous nos yeux, une petite communauté humaine, faite de lucidité et de rêve partagés. Aussi le réalisateur Jean-Paul Julliand rappelle-t-il opportunément, en prélude, la promesse de campagne du futur Président de la République : ‘faire de la scolarité des tout-petits dans les quartiers populaires une priorité de la refondation de l’Ecole’.

 

Samra Bonvoisin

 

« Dis, maîtresse », documentaire de Jean-Paul Julliand-sortie en salle le 25 novembre 2015



26/11/2015
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