Ils nous entendent parler d’argent, nous voient payer, compter… Quoi de plus naturel que nos enfants s’interrogent à ce sujet ? A 7-8 ans, ils découvrent que chaque chose a un prix. On peut donc leur dire, à cet âge-là, d’où vient l’argent, comment on le gagne et quelle valeur on lui attribue. Explications de Geneviève Henry, psychologue.

A quoi sert l’argent ?

A l'âge où ils commencent à acheter tout seuls leurs vignettes de foot ou leurs bonbons à la sortie de l'école, il n'est pas inutile de réfléchir avec eux à la question de l'argent. “Tout a un prix, souligne Geneviève Henry, psychologue, il est important de le rappeler à nos enfants. Si l'on n'a pas l'argent nécessaire, il faut apprendre à économiser, donc à attendre, avant d'acheter. Et quand bien même on aurait assez d'argent, on n'achète pas tout et n'importe quoi.”

L'argent est avant tout un moyen de paiement qui permet de satisfaire des besoins vitaux : manger, s'habiller, se loger. Quand on en a davantage, on peut satisfaire des besoins plus superflus : s'offrir un jeu, un repas au restaurant ou des vacances…

L’argent se gagne

“T'as qu'à aller chercher des sous au distributeur !”, proposent souvent les enfants quand on refuse de leur acheter quelque chose en disant qu'on n'a pas d'argent. Pour combattre cette pensée magique, il faut clairement leur expliquer que si les billets sortent du distributeur, c'est parce qu'on les a mis à la banque, comme dans une tirelire. Si on ne remplit pas la tirelire, pas d'argent au distributeur !

Et c'est en travaillant que l'on gagne de l'argent. “Les salaires des parents paraissent toujours énormes aux enfants, note Geneviève Henry. Leur communiquer une somme brute n'a pas de sens. Il faut expliquer ce que l'on doit payer chaque mois avec, et introduire des comparaisons à leur portée : tel jeu vidéo coûte une journée de travail de leur père…”

L’argent n’achète pas tout

Il n'y a pas d'âge pour aborder les questions philosophiques !  Avoir, posséder, cela nous rend-il plus heureux ? A l'heure de la surconsommation, c'est l'occasion d'en débattre en famille… Bien sûr, ceux qui ont tout nous font envie : difficile de gérer la frustration, ou de renoncer aux vêtements de marque quand tous les copains en ont.

Mais ne peut-on pas être heureux autrement ? Qu'est-ce qui nous rend le plus heureux au fond ? Cela vaut le coup d'y réfléchir ! “C'est important de faire valoir à un enfant que tout n'est pas monnayable dans la vie, souligne Geneviève Henry. L'amour, l'amitié ou le talent ne s'achètent pas…”

Comment expliquer les difficultés financières à un enfant ?

Est-ce qu’on peut manquer d'argent ?

Tous les enfants se posent cette question un jour et l'angoisse est encore plus forte si on ne leur répond pas : ils s'imaginent le pire ! “Quand la famille est touchée sur le plan matériel, indique Geneviève Henry, psychologue, il faut expliquer à l'enfant que l'on aura toujours de l'argent pour manger et se loger, c'est le plus important. Il peut dormir tranquille.”

On peut par ailleurs souligner que la vie va continuer comme avant, mais avec un peu moins. Ce n'est pas qu'on n'achètera plus rien, mais on va acheter différemment, en repérant les produits moins chers par exemple. Et pour les vacances ou le blouson de marque, on verra dans quelques mois, si la situation s'améliore…

L’enfant n’est pas responsable de la situation

Consommer différemment, cela concerne toute la famille ! Et les enfants peuvent être largement associés aux économies : faire les courses en cherchant les étiquettes les moins chères, repérer les bons de réductions, les sorties gratuites au Musée, participer à un vide-grenier pour recycler les jouets, les vêtements (avec l'argent gagné, on pourra s'acheter autre chose).

“L'essentiel, c'est de garder la dynamique familiale, que tout le monde s'y mette pour trouver des solutions, souligne Geneviève Henry. Et que l'enfant n'ait pas le sentiment d'être puni, ni responsable de la situation.” C'est l'occasion aussi d'expliquer à ses enfants qu'ils ne sont pas les seuls à devoir se passer de certaines choses, que d'autres familles sont touchées.

Apprendre à vivre autrement

Apprendre à consommer moins ou différemment ne change rien aux liens familiaux, à l'importance de l'amour dans la famille : tous les enfants doivent l'entendre. “Les relations d'amour et d'amitié ne disparaissent pas parce qu'il y a une perte d'argent, il faut insister sur ce point auprès des enfants, souligne Geneviève Henry. Le plus important reste.”

Certains enfants sont inondés de choses matérielles, parfois pour compenser l'absence des parents retenus ailleurs. Pourtant, beaucoup de plaisirs sont gratuits dans la vie : un goûter avec des copains, un jeu de société en famille… Les situations difficiles sont parfois l'occasion d'apprendre à vivre autrement… et bien plus agréablement !

Sophie Coucharrière