C'est une nouvelle péripétie de la saga au long cours sur les rythmes scolaires. De trente à quarante directeurs d'école publique rennais sur quatre-vingt-un ont décidé de mener une «grève» des inscriptions. Ils refusent d'inscrire les élèves dans leurs établissements pour protester contre la mise en place des nouveaux rythmes scolaires en septembre prochain.
«Surchargés de travail supplémentaire et de réunions en raison de cette réorganisation», ils ont décidé de «rendre à la ville sa compétence en matière d'inscription», explique Pascale Boucq-Roigt, présidente de l'association des directeurs d'écoles publiques de Rennes. Sans remettre en cause le bien-fondé de la réforme des rythmes, elle juge sa mise en œuvre «précipitée» et dénonce «une concertation de façade».
Si la mairie socialiste de Rennes insiste sur «l'habituelle excellente relation» qu'elle a nouée avec ses enseignants par la bouche de son adjointe à l'éducation, Gwenaële Hamon, elle va néanmoins être obligée d'embaucher cette semaine quelques contractuels pour assurer ce travail administratif des inscriptions jusqu'à fin juin. «Une information va bientôt être diffusée aux parents d'élèves. Ce service public sera bien assuré», affirme-t-on à la mairie. Depuis plusieurs dizaines d'années, la mairie demandait aux directeurs d'école primaire d'effectuer cette mission qui consiste surtout à vérifier et réclamer certains documents (carnet de santé, justificatifs de domicile, documents d'identité, etc.) aux parents.
Contre l'allongement de la pause de midi
«Il faut compter entre dix minutes et une heure selon les cas et nous n'y sommes pas obligés. C'était un service que nous rendions à la ville», explique Pascale Boucq-Roigt. Le fait de se dégager de cette responsabilité permettra aux enseignants de gagner un peu de temps, alors que la mairie organise d'ici au mois de juin six ou sept réunions, école par école, pour mettre en place le temps périscolaire dans le cadre de la réforme des rythmes scolaires. L'association de directeurs reproche en réalité surtout à la ville d'avoir décidé d'augmenter la pause de midi, qui durera 2h15 au lieu d'1h45 ou 2 heures, pour organiser des activités sportives ou culturelles. «Nous n'avons ni les locaux ni les équipements permettant d'accueillir les enfants de façon satisfaisante à ce moment-là, explique Pascale Boucq-Roigt. C'est la raison pour laquelle nous avions demandé que cette pause soit stabilisée, voire raccourcie.» Avec cet allongement du «temps méridien», qu'ils dénoncent comme «accidentogène» pour les enfants, les enseignants dénoncent une fatigue accrue des écoliers en début d'après-midi en raison du bruit, une dispersion de leur attention et une difficulté à discerner l'essentiel (activités scolaires) de l'accessoire (activités périscolaires).
Ces affirmations font bondir Brigitte Compain, responsable locale de la FCPE, principale fédération des parents d'élèves du public. «Nous sommes étonnés par ces procédés et par ces plaintes peu compréhensibles. Quant à l'inflation de réunions, n'exagérons rien, observe-t-elle. La réalité, c'est que les enseignants rennais ne sont pas d'accord avec la réforme parce qu'ils vont devoir travailler le mercredi matin.»
À Rennes, la réforme coûtera un million d'euros
«Si, dans d'autres villes, le climat est plus paisible, c'est parce que les enseignants sortiront plus tôt de l'école, à 15h30 ou 16 heures au lieu de 16h30», dénonce-t-elle. Rennes a fait au contraire le choix de ne pas toucher à cet horaire de sortie mais d'allonger la pause de midi, «car nous ne voulions pas voir des enfants dans la rue ou devant la télévision dès 15h30», explique-t-on à la mairie. «Cette pause favorisera un temps de restauration scolaire de qualité et permettra de proposer une offre périscolaire enrichie. Nous aurons ainsi le temps d'accompagner les enfants hors de l'école dans des locaux associatifs», poursuit Gwenaële Hamon, qui rappelle que la mairie va passer de 300 à 800 ateliers périscolaires. Le coût de cette réforme à Rennes est d'un million d'euros, dont 400.000 euros sous forme de financements versés aux associations partenaires.
Marie-Estelle PECH