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Revue de presse : Article dans Le Figaro du 22/12/2010 : Pénurie de candidats au professorat

Le nombre d'inscrits aux concours d'enseignement pour la session 2011 est en baisse dramatique dans certaines disciplines. 

Les chiffres sont édifiants : 21.000 candidats pour les concours d'enseignement du second degré, contre 38.249 l'an dernier ; 18.000 pour le concours de professeur des écoles, contre 34.952 précédemment.

Dans certaines disciplines, cela ressemble même à une hémorragie. Au capes de lettres modernes, sur les 3.000 candidats inscrits, 1.491 étudiants ont composé, alors même que le président du jury espérait sélectionner 1.800 admissibles, pour choisir à l'oral les 800 admis. Ils seront finalement 1.000 à passer un oral où seuls 20% seront recalés. Au capes de mathématiques, 1.500 candidats se sont présentés pour 1.040 postes à pourvoir. Autant dire qu'après le baccalauréat 1968, le capes 2011 restera dans les annales.

Bien sûr, il y a les conditions particulières de cette année de transition. Alors que les écrits se passaient jusqu'à l'an dernier en avril et les oraux en juin, les épreuves d'admissibilité ont été avancées cette année à novembre (excepté pour l'agrégation), avec inscriptions dès le mois de juillet. Ainsi, les étudiants qui venaient de décrocher leur première année de master (M1) n'ont eu que trois mois pour préparer les écrits, ce qui a dû en décourager plus d'un. «L'argument conjoncturel est l'argument optimiste, analyse Jean-Paul Brighelli, auteur de La Fabrique du crétin et qui anime le blog Bonnet d'âne. En fait, c'est un mouvement de fond car on observe une baisse régulière du nombre d'inscrits depuis dix ans. Il est simplement amplifié par la masterisation, qui envoie les stagiaires au casse-pipe.»

La masterisation en question 

Au Snes, premier syndicat d'enseignants du secondaire, on renchérit : «Les arguments du ministère sont déraisonnables pour qui regarde les chiffres à long terme, s'insurge Daniel Robin, cosecrétaire général du syndicat. D'ici à 2014-2015, on verra arriver au niveau des concours les classes creuses. La baisse démographique se conjuguera avec les baisses de postes et la désaffection pour le métier et avec le fait que, pour ne pas voir baisser le niveau, les présidents de jury vont être tentés de ne pas pourvoir tous les postes.» Pour le Snes, on va donc vers des remplacements par des étudiants de licence «et autres bricolages». Une sorte de recréation du corps des maîtres auxiliaires des années 1970. «Et comme ces maîtres auxiliaires seront titularisés sur pression des syndicats, le recrutement des enseignants sera de moins bonne qualité, prédit Jean-Paul Brighelli. Or, déjà en temps normal, les membres des jurys de concours vous disent tout bas qu'ils ne souhaiteraient pas que leurs enfants aient pour professeurs le dernier quarteron des gens qu'ils recrutent…»

 

Car on découvre un des effets pervers de la masterisation : les étudiants qui décrochent un master peuvent espérer des débouchés plus attractifs que ceux que leur propose l'Éducation nationale. De sorte que ce ne sont pas forcément les meilleurs qui se présentent aux concours. L'année prochaine dira si le cru 2011 fut une exception ou l'amplification brusque d'un mouvement. Cette dernière hypothèse fragiliserait dangereusement le concept même de concours de recrutement, fondement du système éducatif français.

 

Par Natacha Polony

 

 



23/12/2010
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