Revue de presse : Article sur www.cafepedagogique.net du 21/12/2011 : Indigestion de suppressions de postes
Si l'objectif gouvernemental est de noyer la répartition des suppressions de postes dans la trêve des confiseurs, l'exercice va être difficile. Sa publication a déjà entraîné un réquisitoire saignant contre Luc Chatel à l'Assemblée, alors que syndicats et parents s'agitent.
Les Antilles, Limoges, le nord et l’est du pays sont les plus touchés par les 14 000 suppressions de postes prévues par le gouvernement. Selon le document du CTM, que le Café s’est procuré, les académies sont touchées de façon très inégale.
Dans le premier degré, « la répartition des moyens d’enseignement pour la rentrée 2012 s’appuie sur la situation relative des académies en fonction de leur niveau de difficultés sociales et de leur rattachement territorial (groupes des académies à dominante urbaine, contrastées, à dominante rurale, d’outre-mer). Elle intègre, enfin, les variations démographiques attendues pour 2012 », explique le document ministériel. On arrive ainsi une répartition où la Guadeloupe, la Martinique et Limoges perdent 4% de leurs moyens, Nancy-Metz, Besançon et Caen 3% et Amiens, Clermont-Ferrand, Dijon, Lille, Reims, Strasbourg et Toulouse 2%. Le détail des postes est fourni dans le tableau téléchargeable ci-dessous. Ces données postent sur 5100 postes, auxquels il faut ajouter 600 emplois concernent les stages des étudiants stagiaires en M2.
Qui sera frappé ? Pour le SNUIPP, si le président tient son engagement de ne pas changer le nombre de classes, "une purge se prépare sur tous les postes hors classe". Les remplaçants, dont on perçoit dès maintenant qu'ils manquent à certains endroits, les enseignants spécialisés des RASED, les animateurs TICE et langues et les maternelles devraient en faire les frais. Le 18 décembre, la Fnaren, qui réunit des enseignants des Rased, appelle les parents à réagir. « Cette carte des suppressions, en ciblant essentiellement les postes dits « hors classe », va contraindre les Recteurs et les Inspecteurs d’Académie à supprimer en priorité les postes de rééducateurs et d’enseignants spécialisés des RASED pour la troisième année consécutive. C’est un véritable couperet qui s’abat sur les RASED en les désorganisant complètement pour la rentrée 2012. »
Dans le second degré, « dans le cadre du dialogue de gestion et des échanges permanents entre l’administration centrale et les recteurs d’académie, le niveau et les possibilités de mobilisation des différents leviers ont été examinés académie par académie ». Le ministère a pris en compte « la taille des classes des collèges qui ne relèvent pas de l’éducation prioritaire », « les décharges de service d’enseignement », « le dispositif de remplacement des enseignants absents » ainsi que « l’organisation de l’offre de formation en lycée d’enseignement général et en lycée professionnel ». Au total, 6 550 emplois disparaissent dont 1 000 concernent les stages des étudiants stagiaires en M2. Les académies les plus touchées sont Caen, Limoges, Nancy-Metz et la Martinique qui perdent 3% de leur effectif. Perdent 2% Amiens, Besançon, Dijon, Lille, Lyon, Orléans-Tous, Reims, Rouen et Strasbourg. Dans certaines académies la situation va devenir très difficile. Ainsi à Créteil, académie populaire, le ministère supprime 233 emplois dans le premier degré alors qu'on annonce 4 075 élèves en plus, selon la CGT, et 362 dans le 2d degré avec 3 084 élèves en plus. Les petits établissements, les remplaçants, les décharges de tous types vont payer la note et l’offre éducative sera réduite, les petits établissements menacés. Les lycées professionnels, où le passage au bac en 3 ans devrait donner tous ces effets, vont probablement perdre de nombreux postes. Le Figaro annonçait aussi que des CPGE et des BTS seraient fermés.
Une vraie passe d'armes a eu lieu à l'Assemblée nationale le 20 décembre. En quelques phrases, le député socialiste Yves Durand a exécuté la politique de Luc Chatel. "Vous prétendez être le premier recruteur alors qu’en ne remplaçant pas un enseignant sur deux, vous avez supprimé plus de 80 000 postes en cinq ans. En fait, monsieur le ministre, vous êtes le premier licencieur de France !",a commencé Y. Durand. "Vous prétendez que cette saignée vous permet de mieux rémunérer les enseignants. Les jeunes qui désertent massivement les concours de recrutement vous répondent de même. Ils refusent de se voir imposer deux années supplémentaires d’études non payées, sans formation, pour quelques dizaines d’euros. D’autant plus qu’au bout de cinq ans, leur salaire sera gelé, comme pour tout fonctionnaire. Les enseignants français restent les plus mal payés d’Europe. Contrairement à vos sempiternels discours d’autosatisfaction, l’école ne cesse de se dégrader, comme le montrent toutes les études, y compris celles de votre propre ministère. C’est d’ailleurs pour cela que vous en interdisez la publication". Luc Chatel a vaguement contesté les chiffres et repoussé l'idée d'un moratoire, demandé par le PS. "Le mot moratoire vient du latin morari signifie retarder. Vous retardez, M. Durand", a conclu le ministre.
Les syndicats dénoncent ces suppressions de postes. "Le ministère s'acharne contre l'école primaire" écrit le Snuipp qui signale que "avec toujours moins d'enseignants le "sur-mesure" pédagogique (la personnalisation vantée par le ministre) n'est que poudre aux yeux". Et ce sont maintenant les parents qui montent en ligne. Pour la Fcpe, "l'aveuglement idéologique est tel que là où le gouvernement frappe le plus durement c'est dans les territoires les plus défavorisés socialement : Nord-Pas-de-Calais, Lorraine, les académies de banlieue parisienne". La Peep, qui déclarait en octobre "Il manque des professeurs dans les classes" a publié un communiqué pour féliciter le HCE de son récent rapport et signale qu'elle "réaffirme que l’école primaire doit bénéficier d’une priorité dans l’affectation des moyens. Nécessité que le budget 2012 de l’Education nationale ne semble pas avoir pris en compte...."
Téléchargez le tableau des suppressions de postes
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