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Revue de presse : Article sur www.rue89.com du 30/03/2011 : Aidez-nous à compléter la carte des "écoles mortes"

Mathieu Glaymann est un père en colère. Membre de la FCPE 93, il se bat contre l'Education nationale, notamment en envoyant des e-mails énergiques aux rédactions (« Nous ne lâcherons pas l'affaire ! »).

Dans l'école de son fils, à Epinay-sur-Seine, la situation ne s'arrange pas : cette semaine, il y a trois profs absents non-remplacés. Le papa-militant tient un compte des jours d'école perdus depuis la rentrée (plus de 600 dans l'ensemble des établissements de sa commune).

Du 11 janvier au 15 mars, Mathieu Glaymann a occupé, avec d'autres parents d'élèves, l'école maternelle Jean-Jaurès-Sud. Pacifiquement. Le 15, il a déposé avec eux un recours à la Halde pour discrimination territoriale. Jeudi, il participera à la très grande journée « école morte » prévue en Seine-Saint-Denis. Une vingtaine d'écoles du département sont mobilisées.

En ce moment, c'est une épidémie. Partout en France, des écoles « meurent ». Pour les « tuer », les parents occupent l'école avec leurs enfants, généralement une journée. Les classes restent vides.

Suppression de 16 000 postes

A Boulogne-sur-Mer, au Havre, au Mans et à Paris, ils drapent les écoles de banderoles rouges. Ils organisent des « goûters revendicatifs », comme ce jeudi, à l'école maternelle Pali-Kao à Paris.

Les parents se mobilisent contre la suppression de 16 000 postes à la rentrée prochaine, prévue dans le cadre de la loi de finance. Dans l'enseignement public seront supprimés 8 967 postes d'enseignants en primaire, dont 5 600 au titre d'une « résorption » d'un actuel « surnombre » d'enseignants :

  • 4 800 postes d'enseignants en collèges et lycées ;

  • 600 postes au sein des personnels administratifs.

Agnès Verdier-Molinié, directrice de la fondation Ifrap (un think tank ultralibéral), minimise l'impact de la mesure : « Il faut quand même rappeler que ce ne sont pas des licenciements, mais des non-remplacements de fonctionnaires. »

 

Quid de l'enseignement et des enfants ? « Le budget de l'Education nationale est passé de 60 à 63 milliards, cette année. En pleine crise, les dépenses n'ont pas été gelées. » 

Peu de marge avant les vacances

Le sort des collèges et lycées est presque réglé : les dotations globales horaires, appelées « DGH », ont été communiquées à la plupart des directeurs d'établissement par leurs académies. Ils doivent les « convertir » en nombre de postes d'enseignant.

Pour les écoles maternelles et primaires, les informations sont tombées plus tard, début avril (sauf à Paris). Selon les syndicats, le gouvernement a jugé plus prudent de reporter après les élections cantonales toute communication officielle concernant la carte scolaire. Un représentant FSU : « Même s'il y a eu des fuites et que des écoles du premier degré ont commencé à se mobiliser, cela va aussi nous laisser très peu de marge avant les vacances de Pâques. Le timing était idéal pour eux. » 

Paris : éviter les écoles ghettos

Emmanuelle Gosselin, maman mobilisée du XXe arrondissement pour l'école primaire de Tourtille, pense qu'à Paris, ces actions peuvent faire reculer l'inspection académique : « Ils n'aiment pas que les parents d'élèves fassent du bruit. A l'école de la rue de la mare à Paris, grâce à leur mobilisation, les parents ont réussi à sauver une classe. »

Elle est convaincue qu'il est essentiel de conserver des moyens dans ces écoles « très défavorisées » du Bas-Belleville. Ces établissements risquent de se transformer en « écoles ghettos » sans mixité sociale. Si les classes sont trop chargées, les parents qui peuvent se le permettre mettront leurs enfants dans d'autres écoles.

Emmanuelle Gosselin compte se mobiliser jusqu'en juin et se dit prête à recommencer chaque année.

 

Agnès Truchot, directrice de l'école maternelle Pali-Kao, proche de Tourtille : « Chaque rentrée, on efface tout et on recommence. Il n'y a pas de stabilité. On nous attribue et on nous retire des postes, sans prévenir. Cette fois, on me retire une rééducatrice sans m'avoir passé un coup de fil, pour faire un bilan du poste. Elle est extrêmement compétente, c'est dommage de la perdre. »

Les Ardennes : les lycées pros sont touchés

Les établissements du nord-est de la France sont particulièrement touchés par les suppressions, pour des raisons démographiques. Christophe Clément, vice-président de la FCPE Ardennes (plus de 250 postes en moins, selon lui) : « Dans notre département, les coups ont été portés dans des lycées professionnels et en ZEP, qui ont des taux de réussite au brevet et au bac pas bons. C'est totalement incompréhensible. Ce sont les familles défavorisées qui vont payer. » 

 

Didier Janin, enseignant et secrétaire départemental FSU du même département : « Dans les écoles, nous savons déjà que les postes les plus touchés seront les fameux Rased, qui aident les élèves en difficulté. »

Selon lui, l'objectif est de fabriquer une école au rabais pour tout le monde. Dans sa section STI « développement durable », il explique que les langues vivantes vont encore être malmenées. Elles seront enseignées 1h30 au lieu de 2 heures par semaine.

Le Nord : gagnant de la « Star Académie »

Autre département très touché : le Nord-pas-de-Calais, avec 865 suppressions de postes. Sur son blog, la FCPE du 59 explique qu'il y a 148 suppressions de postes plein temps dans les écoles du premier degré alors que le nombre d'élèves augmente de 63. Hachemi Salhi, président, ajoute : « Nous avons gagné la “Star Académie” des suppressions. Avec le Pas-de-Calais, nous allons organiser des actions au niveau de l'académie. » 

Hachemi Salhi ne comprend pas pourquoi sa région est la plus touchée par les suppressions, alors que les indicateurs socio-économiques sont au plus bas : « On nous massacre, sous prétexte d'une baisse démographique. »

Le parent d'élève regrette les incohérences de la carte scolaire : « A Roubaix, on ferme une section STI à Jean-Rostand, pour en ouvrir une à Jean-Rémy dans le privé. Juste à côté. Je vous assure, c'est la réalité. »

Selon La Voix du Nord, dix-huit classes sont menacées de fermeture dans le Boulonnais (Pas-de-Calais).

« Quand les parents sauront, le nombre d'actions va exploser »

Présidente de la FCPE de la Somme, Ghislaine Lefèvre explique de son côté qu'une trentaine de postes vont être supprimés dans les lycées du département et le double dans les collèges : « Des bac pros et des BTS qui correspondent aux entreprises de la région risquent d'être supprimés. Les entreprises risquent de partir. »

Elle explique également qu'au lycée Thuillier, les élèves qui habitent loin ne pourront plus dormir dans les locaux le dimanche soir. Le lycée sera fermé, pour économiser du personnel. La présidente de la FCPE pense que « quand les parents sauront tout ça », le nombre d'actions « va exploser ».

 

Par Nolwenn Le Blevennec | Rue89 | 30/03/2011 | 19H30



05/04/2011
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