Revue de presse : Article dans L'Express du 12/05/2011 : Le paradoxe du marché des aliments santé
Les autorités françaises et européennes gardent un oeil de plus en plus vigilant sur les produits présentés comme des aliments santé, mais le marketing industriel reste le plus fort.
Activia, Actimel, Fruit d'or pro activ, les produits "vu à la télé" sont les plus spontanément cités par les consommateurs pour désigner des aliments santé dans le commerce, c'est-à-dire qui apportent un bienfait pour la santé. Pourtant, depuis 2006, les autorités européennes, par l'intermédiaire de l'Autorité Européenne de Sécurité des Aliments (EFSA), sont plus sévères sur ces aliments qui jouent de leurs caractéristiques de "recette miracle" pour lutter contre le cholestérol ou des problèmes de transits intestinaux.
Les allégations nutritionnelles de santé, qui permettent aux marques d'adosser des labels comme "allégé en sucre" ou "riche en calcium" à leurs produits, sont désormais distribuées au compte-goutte. Danone a ainsi préféré anticiper un refus et a cessé de jouer sur le côté "alicament" de ses produits, en retirant les mentions sur ses emballages ou dans ses spots publicitaires. "Le renforcement des exigences va permettre une meilleure lisibilité du marché", approuve Marie-Paule Serre, professeur en droit et marketing des produits de santé à l'Université Pierre et Marie Curie de Paris, qui regrette néanmoins la lenteur de la mise en application de la réglementation.
Il est difficile de faire passer un message limpide aux consommateurs
"Il faut se méfier de ces arguments curatifs, signale Marie-Paule Favrot, professeur en cancérologie et conseillère santé à l'Agence nationale de sécurité sanitaire (Anses). Aucun aliment n'est un médicament et les allégations suggérant un effet curatif devraient être interdites. La meilleure alimentation possible est celle qui est équilibrée. "Paradoxalement, les sondés se disent freinés dans leurs achats par la présentation "marketing" très marquée de certains aliments santé alors même que ce sont ces produits phares qu'ils citent en premier lieu, rapporte une étude réalisée par les étudiants de l'UPMC, et chapotée par Déborah Wallet-Wodka, maître de conférence en marketing des produits de santé. "Il est difficile de faire passer un message limpide aux consommateurs, regrette le docteur Pierre Adwison, directeur des affaires scientifiques de l'Institut national de prévention et d'éducation pour la santé (Inpes). La puissance du lobby industriel en termes de budget publicitaire est élevée face aux capacités de déploiement des autorités publiques."
89% des Français pensent que l'alimentation influe sur la santé
L'étude révèle également que les consommateurs portent un regard attentif sur la caution des professionnels de santé. La confiance est essentielle pour ce type de produits, dont la motivation d'achat est très majoritairement de rester en bonne santé (45,6%). Un vrai paradoxe quand, dans le même temps, 66,4% des sondés qui en consomment font leurs achats dans des hypermarchés, sans la possibilité de se faire conseiller. Pour Stéphane Korsia-Meffre, coordinateur du site eurekasante.fr mis à disposition par Vidal, "les médecins ont aussi leur part de responsabilité en ne s'intéressant pas assez à l'alimentation."
Avec 89% des Français qui pensent que l'alimentation influe sur la santé, selon le Programme Nutrition National Santé (PNNS), et trois sur quatre qui comptent consommer des aliments santé dans l'avenir, le phénomène va au-delà des hypocondriaques acharnés. Le sacrifice budgétaire pour l'achat de produits portant un label d'un professionnel ne fait pas trop reculer les intentions d'achat. "Le public est prêt à payer pour être en bonne santé, constate Charles Pernin, responsable des questions alimentaires pour l'association de consommateurs CLCV, étonné de voir le prix cité en sixième position des freins à l'achat dans l'étude. Il faut se méfier des dérives industrielles et du vocabulaire des experts du marketing alimentaire qui brouillent le message pour le public."
Par Benoît Magistrini
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