Revue de presse : Article dans Le Figaro du 10/09/2012 : Les enfants insatisfaits sont plus sensibles à la pub
Qu'est-ce qui rend les enfants heureux ? Le fait de posséder le dernier smartphone, la nouvelle Game Boy ou le jean dernier cri ? Les enfants de 8 à 11 ans qui ne sont pas satisfaits de leur vie semblent être particulièrement vulnérables à la publicité et désirent posséder des objets dont ils pensent qu'ils les rendront heureux. Mais ce n'est pas pour autant qu'un enfant «matérialiste» est forcément malheureux. C'est l'une des conclusions d'une étude menée aux Pays-Bas par des chercheurs du Centre sur les enfants, les adolescents et les médias, de l'université d'Amsterdam, qui a consisté à faire subir, à un an d'intervalle, des tests approfondis à 466 enfants âgés de 8 à 11 ans.
«Le résultat le plus frappant de notre étude, c'est que, contrairement à une idée reçue, le matérialisme chez les enfants de 8 à 11 ans ne conduit pas à moins de satisfaction», a expliqué au Figaro le Dr Suzanna Opree, principal investigateur de l'étude conduite en deux vagues, la première en octobre 2006, la seconde un an plus tard. «À l'inverse, ajoute-t-elle, nous avons découvert que ce sont les enfants qui sont les moins satisfaits dans leur vie qui deviennent les plus matérialistes avec le temps, mais seulement lorsqu'ils sont abreuvés de publicités. La publicité semble apprendre aux enfants que les possessions sont un moyen d'accroître le bonheur.»
Plusieurs études avaient déjà démontré une plus grande insatisfaction chez les enfants les plus obsédés par le matériel, mais c'est la première fois que l'on esquisse une chronologie explicative. Le «matérialisme» ne commence à se développer chez les enfants qu'à partir de l'âge de 8 ans. La période de 8-11 ans est une phase décisive car l'enfant passe par une phase dite analytique au cours de laquelle il développe son sens de consommateur. «Durant cette phase, détaille le Dr Opree, les enfants deviennent conscients de la signification symbolique des objets. Contrairement aux plus jeunes, ils commencent à vouloir acquérir des produits non seulement pour le plaisir de les avoir mais aussi dans le but d'accroître leur bonheur et leur statut social.»
Les chercheurs néerlandais ne se sont pas contentés d'évaluer le désir de possession matériel et le bonheur des enfants, ils les ont aussi comparés à la quantité de publicités télévisuelles qu'ils avaient vues. «Nos résultats indiquent clairement qu'il n'y a pas de relation entre l'épanouissement des enfants et la quantité de publicité qu'ils regardent, explique Suzanna Opree, les enfants malheureux n'en voient pas plus que les enfants heureux. Ils semblent simplement plus sensibles à ses effets.» D'autres travaux avaient noté que les enfants de milieux défavorisés étaient les plus enclins à croire à la vertu d'avoir des objets de marques pour se rendre populaires, mais cet aspect n'était pas inclus dans l'étude néerlandaise. En revanche, pour les auteurs ce n'est pas l'intensité du matérialisme qui compte le plus : «Peu importe à quel point un enfant est matérialiste, conclut le Dr Opree, en définitive les possessions sont moins importantes pour le bien-être d'un enfant que des liens familiaux forts et chaleureux.»
Il se pourrait donc que la publicité ne soit pas forcément nocive, mais qu'elle puisse accentuer le matérialisme de certains enfants en leur faisant croire que posséder plus serait une solution à leur mal-être. Pour éviter cela, les auteurs proposent bien sûr de réduire le temps d'exposition aux publicités mais ils suggèrent aussi deux approches éducatives. D'abord, développer le regard critique des enfants sur les mécanismes déployés par la publicité pour leur donner envie du produit. Ensuite, leur apprendre qu'il existe d'autres sources de bonheur dans la vie, telles que l'amour, l'amitié. Et là, pas besoin d'attendre qu'ils aient 8 ans pour le faire.
Trop tard pour les adultes
Alors que l'étude du Dr Opree et ses collègues montre qu'il est encore possible d'éviter aux enfants de développer un matérialisme excessif aux dépens de leur bien-être, les choses semblent figées chez l'adulte. Selon eux, plus un adulte est matérialiste et moins il est heureux ; moins un adulte est heureux, plus il devient matérialiste. Plusieurs théories sont évoquées. Tout d'abord celle de l'escalade : plus on possède, plus on veut posséder. Les matérialistes développeraient un insatiable besoin de posséder. Une autre hypothèse postule que les gens matérialistes sont juste des personnes qui ont des attentes très importantes et qui sont conscientes de l'écart entre la réalité et leurs espoirs, d'où leur état d'insatisfaction perpétuelle. Enfin, certains chercheurs suggèrent qu'en se focalisant sur les biens matériels et les satisfactions superficielles, les matérialistes en oublient les bonheurs plus simples.
Par Damien Mascret
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