Revue de presse : Article dans Le Figaro du 21/03/2011 : L'essor des allergies alimentaires de l'enfant
En vingt ans, leur fréquence a doublé en France et dans les autres pays industrialisés.
En constante augmentation, les allergies alimentaires frappent entre 3 et 7% des enfants des pays développés et leur fréquence croît aussi dans les pays en développement. Cette évolution, leur gravité potentielle et les difficultés du diagnostic ont conduit les États-Unis en 2010, et aujourd'hui la Grande-Bretagne, à édicter de nouvelles recommandations pour aider les médecins à mieux les identifier et les prendre en charge. En France, si l'on ne dispose que d'enquêtes épidémiologiques partielles, la fréquence semble identique avec 5 à 8% des enfants de 1 à 2 ans atteints contre 2% chez l'adulte. «Malgré les différences d'alimentation d'un peuple, d'un pays à l'autre, on retrouve toujours les mêmes allergies alimentaires chez l'enfant : lait, œufs, arachides, poissons, crustacés (crevettes surtout)», souligne le Dr Fabienne Rancé, pédiatre allergologue (CHU, Toulouse). «Avec deux particularités en France : l'allergie à la noisette, parce que nos enfants mangent du Nutella alors que les petits Anglais et Américains mangent du beurre de cacahuète, et celle au kiwi, encore inexpliquée.»
L'allergie alimentaire vraie se présente sous diverses formes. «Dans 90% des cas, la réaction est immédiate : l'enfant mange une cacahuète et dans les 10 minutes, au maximum dans l'heure qui suit, il fait une urticaire et parfois un œdème. Un signe est typique de l'allergie alimentaire : l'enfant se gratte la paume des mains, la plante des pieds et le cuir chevelu. Parfois, la réaction est plus violente, avec vomissement ou crise d'asthme, voire dans les cas graves un choc anaphylactique avec chute de tension ou pire, un arrêt cardiaque. Plus fréquente chez les enfants ayant un eczéma atopique sévère, cette réaction allergique peut aussi survenir hors de ce contexte», explique le Dr Michel Bouvier (allergologue, CHU de Lyon). Il existe aussi une forme de réaction retardée, surtout dans l'allergie au lait de vache : l'enfant a la diarrhée, présente des signes de dénutrition, et souvent une cassure de la courbe de croissance qui doit alerter.»
Test de provocation orale
Le diagnostic est précisé par des tests cutanés (prick-tests) et un dosage sanguin des IgE spécifiques, puis confirmé par un test de provocation orale, «qui doit toujours être réalisé en milieu hospitalier par du personnel entraîné», insiste le Dr Fabienne Rancé. «Ces tests standardisés font l'objet de recommandations précises. Mais les allergies alimentaires vraies ne représentent qu'une petite partie de toutes celles soupçonnées à tort.» Pour le Dr Bouvier, les médecins ont trop tendance à demander un test d'IgE spécifiques à la moindre suspicion d'allergie alimentaire. Quelles sont les causes de cette recrudescence ? La génétique joue un rôle puisque 80% de ces allergies surviennent dans des familles d'atopiques.
«Mais surtout notre environnement : nous vivons dans des logements plus confinés, plus exposés aux acariens, notre agriculture, nos arbres ont changé et nous exposent à des pollens qui provoquent des réactions d'allergie croisée aux aliments, par exemple allergie au pollen de bouleau et à la pomme ou la noisette, au pollen de cyprès et à la pêche… Nous consommons aussi plus de plats industriels dont des constituants ajoutés ou transformés modifient le pouvoir allergisant des aliments», explique le Dr Rancé. «En revanche, incriminer une diversification trop précoce de l'alimentation des bébés relève du mythe. Avant 3 mois, c'est trop tôt, mais il faut qu'elle ait lieu entre 4 et 6 mois. Après, on risque de favoriser l'allergie.»
Arachides, noix de cajou et crustacés
Le traitement repose avant tout sur l'éviction de l'aliment responsable. Mais chaque allergie évolue différemment. L'allergie au lait ou à l'œuf disparaît assez vite. «Quand elle persiste au-delà de l'âge habituel, l'allergologue peut tenter une réintroduction pour induire la tolérance, en milieu médical spécialisé. Au cas par cas, on peut aussi permettre de consommer l'aliment en petite quantité, en dessous de la dose limite», précise le Dr Rancé.
En revanche, les allergies aux arachides, à la noix de cajou, et dans une moindre mesure aux poissons et crustacés, sont fréquemment fixées, définitives. «Dans les allergies graves avec risque anaphylactique, comme celles à l'arachide, une trousse d'urgence comprenant un antihistaminique, de la cortisone, de la Ventoline et un stylo Anapen d'adrénaline doit être accessible en quelques minutes», insiste le Dr Bouvier. Ces enfants sont désormais admis en milieu scolaire grâce à un programme d'accueil individualisé établi en concertation avec l'établissement, la famille et la mairie. «Mais dans de nombreuses villes, comme à Lyon, les mairies refusent encore de les accueillir.»
Par Martine Lochouarn
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