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Revue de presse : Article sur www.cafepedagogique.net du 15/02/2011 : Qu'est-ce qui détermine les difficultés en lecture ? Entretien avec Gabriela Gomez Vera

L'acquisition de la lecture, peut-il être plus ou moins efficace en fonction de la langue dans laquelle il s'effectue? En se basant sur les résultats de PIRLS, Gabriela Gomez Vera montre qu'en dernière analyse, les facteurs contextuels (individuels et scolaires) sont plus importants que la langue elle-même. "Pour mieux comprendre la réussite scolaire, il faut savoir ce qu'il se passe à l’école, mais aussi ce qu'il se passe à la maison". La thèse que Gabriela Gomez Vera vient de soutenir à l'IREDU (sous la direction de Bruno Suchaut) réintroduit les facteurs sociaux comme facteurs déterminants de la réussite en lecture et donc de la réussite scolaire.


Les résultats de PISA 2009 ont encore mis en avant les inégalités devant la lecture et ce qu'elles généraient d'inégalités scolaires. Ce lien entre réussite scolaire et compétences en lecture est-il universel ?


Le rôle de la lecture dans l'apprentissage est indéniable. À l'école, même dans les disciplines scientifiques les plus formalistes, le processus d'enseignement s'accomplit toujours par l'interaction communicative. PISA reconnaît cette importance quand il définit la lecture non seulement comme comprendre et utiliser des textes écrits, mais aussi réfléchir, et (nouveauté dans sa définition) : s’y engager.


Toutefois, le terme « universel » doit être utilisé avec prudence, particulièrement lors qu'on prend comme référence une étude comme PISA 2009. À cette évaluation ont participé les 34 membres de l’OCDE ainsi que 41 autres pays. Par conséquent, la grande diversité des systèmes éducatifs doit être un élément à considérer attentivement dans toute lecture des résultats. Il existe essentiellement deux parcours à suivre pour interpréter l'information de cette étude. D'une part, des généralités peuvent être inférées, comme celle dont nous discutons, et il faut souligner l'importance de certains aspects de l'apprentissage ou des facteurs déterminants. D'autre part, on peut également mettre l'accent sur les différences entre un système éducatif et l'autre, c'est la prochaine étape logique après l'identification d'un facteur clé. Par exemple, maintenant que le rôle de la lecture est reconnu et accepté, il faut approfondir sa connaissance et identifier ce qui détermine son succès, ce qui peut être très différent d'un pays à l'autre.


Après avoir mis en évidence les différences entre les systèmes éducatifs, c'est là que les études internationales comme PISA, PIRLS ou d'autres, peuvent nous parler plus significativement des inégalités.


On explique traditionnellement la réussite de certains systèmes scolaires, le finlandais par exemple, par le caractère simple de la langue, sa quasi absence d'orthographe. Au contraire les difficultés orthographiques du français joueraient en défaveur des jeunes français. Etes vous d'accord avec cela ?


Toute langue a une orthographe, il y a certaines propriétés du passage de l’oral à l’écrit qui peuvent faire une différence dans la qualité de la lecture, à savoir, la régularité avec laquelle l’orthographe représente les phonèmes de la langue. Dans les catégories les plus extrêmes, nous trouvons, d’une part, l’Anglais comme une langue hautement irrégulière et d’une difficile acquisition, et d’autre part, des langues comme le Finlandais ou l’Espagnol dont la régularité se rapproche de l’idéal d’une orthographe phonétique.


Pourtant, je ne crois pas qu’une seule caractéristique, pas exclusive au Finlandais en plus, peut faire basculer tous les résultats d’un test. Du point de vue de l’orthographe, on ne peut pas parler des avantages ou désavantages du finlandais sans étudier en même temps des particularités des autres langues avec lesquelles on la compare. Le Finlandais n’est pas une langue isolée, toutes ses caractéristiques sont aussi présentes dans plusieurs autres langues, qui sont parlées dans des pays qui ont des résultats très divers au test PISA. 


Il faut souligner que, au-delà de la Finlande, les autres pays au palmarès de PISA 2000 sont des pays anglophones, dont l’orthographe est tout sauf transparente. Dans les résultats de PISA 2009, on trouve des régions où on parle le Chinois et le Coréen, toutes les deux des langues morpho-phonologiques, voir plus complexes orthographiquement. En définitive, dans PISA il y a des langues orthographiquement irrégulières qui arrivent également à obtenir des résultats remarquables. Par ailleurs, ce sont les langues régulières : l’Espagnol, l‘Italien, le Grec qui semblent être systématiquement en dessous de la moyenne.


Le lien entre la structure de la langue et la réussite en lecture, est bien fondé sur des recherches qui comparent des langues. Il y a effectivement une différence importante de rendement entre une langue régulière et une langue irrégulière, mais en début d’apprentissage. Il s’agit du décodage plus que de lecture proprement dite. Dans PISA on ne parle pas du décodage mais de compréhension, laquelle est une procédure très différente, plus liée aux compétences cognitives et métacognitives qu’à la structure de la langue. Un lecteur de 15 ans ne lit pas en faisant appel à la lecture phonologique (décodage son par son), il passe directement aux unités plus complexes, tel que le mot et les phrases (même pas les morphèmes).


Mais alors quels facteurs peuvent expliquer les inégalités de compétences scolaires ?


Par rapport aux enquêtes comme PISA ou PIRLS, on a beaucoup parlé des facteurs économiques, ou socio-économiques, mais, sans nier le rôle que ces déterminants peuvent jouer, il faut aussi regarder les autres composants qui entourent la situation d'apprentissage. L'analyse des facteurs liés aux caractéristiques individuelles montre qu'il y a des aspects subjectifs qui déterminent aussi la réussite scolaire. Mes recherches sur PIRLS m'ont montré qu'une attitude positive envers la lecture entre les élèves, accompagnée du soutien de la part des parents et des enseignants, sont des éléments clés pour expliquer le succès en compréhension de la lecture. Un regard plus attentif aux réalités individuelles et aux subjectivités qui affectent l'apprentissage peut être innovateur et significatif. Pour mieux comprendre la réussite scolaire, il faut savoir ce qu'il se passe à l’école, mais aussi ce qu'il se passe à la maison.


Quelles conséquences peut on en tirer pour l'école et pour les politiques éducatives en  général ?


Surtout ne pas croire qu’il y a des formules magiques, ou des facteurs inamovibles comme l’orthographe qui détermineront la réussite dans des comparaisons internationales telles que PISA. Pourtant, le lien entre la structure de la langue et la réussite en lecture, est bien fondé sur des recherches qui comparent des langues, il y a effectivement une différence importante de rendement entre une langue régulière et une langue irrégulière, mais ça c’est au début d’apprentissage, il s’agit du décodage plus que de lecture proprement dit. Dans PISA on ne parle pas du décodage mais de compréhension, laquelle est une procédure très différente, plus liée aux compétences cognitives et métacognitives qu’à la structure de la langue.


Cela dit, on peut aussi en tirer que les comparaisons internationales continuent à être une source valide d’information pour l’école et la politique éducative, car elles ne sont pas biaisées par les différences linguistiques. Évidement, ça ne veut pas dire que la culture n’est pas un facteur qui peut déterminer les résultats. Mais il faut chercher ses manifestations ailleurs que dans l'orthographe.


Gabriela Gomez Vera


La thèse de G Gomez Vera :

http://iredu.u-bourgogne.fr/toute-lactualite/actualites-in[...]


Sur le Café :

Lecture vrai débat fausses solutions

http://www.cafepedagogique.net/lesdossiers/Pages/lecture[...]

Dossier lecture

http://www.cafepedagogique.net/lesdossiers/Pages/LaLectu[...]

 



15/02/2011
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