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Article dans Le Monde du 21/09/2010 : Pour un système éducatif épanouissant

Bernard Gauducheau, maire de Vanves (Nouveau Centre) et conseiller régional d'Ile-de-France


Le débat lancé par le ministère de l'éducation nationale sur la semaine de quatre jours est toujours d'actualité. La réforme des rythmes scolaires ne sera marquante qu'en révolutionnant profondément les rapports entre les activités scolaires, périscolaires et les vacances.

 

A peine généralisé en 2008, le principe d'une semaine de quatre jours dans les écoles primaires pourrait être prochainement modifié. Voilà donc un exemple du mal typiquement français consistant à remettre systématiquement en cause une décision avant même que l'on ait pu en percevoir l'impact. Pourtant, le principe du rythme de quatre jours avait été laissé à la libre appréciation des conseils d'écoles regroupant les parents, les fédérations de parents d'élèves, les enseignants et les élus. Même si les échanges avaient été complexes, la communauté éducative s'était au final majoritairement prononcée en faveur de ce changement dans le cadre d'un contexte local.

 

Or, certains représentants de parents d'élèves souhaitent aujourd'hui voir repasser les écoles primaires à un rythme de quatre jours et demi par semaine, avec 3 heures de cours le mercredi matin. L'académie de médecine, préconise le retour à une école sur cinq jours, un trimestre articulé autour de sept semaines de travail pour deux semaines de congés, et la réduction des congés d'été.

 

Des spécialistes en tout genre estiment que les enfants ont des semaines surchargées. Est-ce seulement la responsabilité du rythme scolaire ou celle de parents qui inscrivent leurs enfants à de multiples activités car ils n'ont malheureusement pas toujours le temps de s'en occuper ou qu'eux-mêmes sont piégés par des carrières professionnelles de moins en moins conciliables avec la vie de famille ?

 

Ces incessants va-et-vient sur le thème des rythmes scolaires existent depuis des années mais il faut arriver à prendre une décision raisonnable et juste car les enfants ne sont pas des jouets que l'on déplace au gré des études qui se succèdent et ne se ressemblent pas.

Une nouvelle modification brutale pourrait pénaliser les communes et les associations qui s'étaient organisées pour offrir des activités et des projets pédagogiques aux enfants sur le temps libéré. Elle serait surtout précipitée alors qu'une décision aussi cruciale mérite une réflexion et une concertation poussées pour qu'une position judicieuse soit définitivement tranchée.

 

Aujourd'hui, notre pays reste dans la moyenne haute des pays européens avec 828 heures de classe par an. Une nouvelle fois, les pays scandinaves cités en exemple pour leur réussite scolaire comme la Suède avec ses 750 heures et la Finlande avec ses 650 heures annuelles peuvent nous inspirer. Les jeunes Français ont un temps de travail concentré sur 35 semaines, la moyenne de l'OCDE se situant à 38 semaines. Les pays nordiques affichent de bonnes performances grâce à des journées allégées allant de pair avec des vacances plus courtes.

En France, les vacances d'été sont liées à notre héritage agricole où la période estivale permettait les vendanges et la moisson. Au XXIe siècle, nous pourrions en revoir la périodicité sans pour autant pénaliser l'industrie touristique. En effet, les congés des français tendent à se répartir tout au long de l'année et sur des périodes courtes ou des week-ends prolongés pour des raisons économiques et les 35 heures.

 

TROUVER LE JUSTE ÉQUILIBRE

 

Je regrette que ces propositions et ces décisions soient prises sans une réelle concertation de la communauté éducative englobant aussi les acteurs de la vie périscolaire, comme les accueils de loisirs. Aujourd'hui, les animateurs des accueils de loisirs encadrent les enfants 944 heures par an en période scolaire et pendant les vacances. A cela, il faut aussi ajouter les 2 heures de cantine par jour concernant 80 % des élèves soit 276 heures par an et les 2,5 heures de garderies du soir en maternelle, représentant 345 heures par an. En comparaison, les enseignants s'occupent des enfants 138 jours par an soit 828 heures annuelles. Une journée complète peut très légitimement être réservée aux accueils de loisirs contribuant à l'épanouissement et à l'éducation des enfants. En tout état de cause, la réflexion sur les accueils de loisirs doit être un des piliers fondamentaux d'une réforme des rythmes scolaires.

 

C'est d'autant plus vrai que ce sont souvent les familles les plus modestes, ne pouvant avoir recours à des prestataires privés et onéreux, qui confient leurs enfants aux accueils de loisirs. Une réforme du rythme scolaire irréfléchie pourrait avoir des conséquences néfastes sur les efforts entrepris en matière de formation des animateurs et sur la poursuite d'une politique de professionnalisation de ce secteur de la fonction publique territoriale.

Dès la rentrée prochaine, Luc Chatel, ministre de l'éducation, a l'intention d'expérimenter, dans une centaine de collèges et lycées volontaires, un nouveau rythme scolaire favorisant les matières classiques le matin et le sport l'après midi pour lutter contre l'absentéisme, la violence et proposer un nouveau mode d'épanouissement des élèves. On pourrait aussi proposer des matières plus artistiques et culturelles pendant ces après-midis. Dans les années 1950 à Vanves, le docteur Max Fourestier avait été d'ailleurs à l'initiative d'une révolution pédagogique en proposant au niveau communal un tiers temps pédagogique et sportif complété par des classes de neige. Ainsi, sur le temps de présence à l'école, l'enfant consacrait la matinée au travail intellectuel, l'après-midi aux exercices physiques et la toute fin de journée à l'étude. Malheureusement, il n'y pas eu de suite …

 

Une réforme du temps scolaire doit être mûrement réfléchie et ne pas céder aux sirènes des débats médiatiques et aux dérapages de la polémique. Elle doit contribuer au juste équilibre entre le rythme de l'enfant, la répartition des vacances sur l'année, les contraintes parentales, le temps libre laissé aux familles, les contenus éducatifs et l'apport des activités périscolaires des mairies et des associations. En attendant de trouver un réel consensus, conservons la semaine de quatre jours pour en tirer des enseignements concrets tout en préparant une véritable réforme.

 

L'important est de favoriser un système éducatif épanouissant et permettant la réussite de la formation, de l'égalité des chances et de la promotion sociale de nos plus jeunes concitoyens. C'est d'autant plus important qu'à l'heure de la mondialisation, l'excellence de l'éducation nationale représente un avantage sur lequel notre pays doit mettre l'accent et servira au maintien de la France en tant que puissance mondiale capable d'être innovante et formant des citoyens responsables et autonomes. La France se doit d'être un phare plutôt qu'une lanterne.

Bernard Gauducheau, maire de Vanves (Nouveau Centre) et conseiller régional d'Ile-de-France


01/10/2010
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