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Revue de presse : Article dans Le Figaro du 16/11/2010 : Leçons d'étonnement chez les enfants

Par Marie-Noëlle Tranchant

Ce n'est qu'un début, de Jean-Pierre Pozzi et Pierre Barougier, suit une expérience d'ateliers de philosophie en maternelle. De quoi se poser des questions.

Ils ont d'adorables frimousses et des voix joliment balbutiantes quand ils s'appliquent à exprimer ce qu'ils veulent dire. Ils participent régulièrement à des «ateliers à visée philosophique». Sous ce terme pompeux comme les affectionne l'Éducation nationale, une innovation pédagogique. Au moment où l'on supprime les heures de philo en terminale (peut-être parce qu'on y est trop occupé à apprendre à lire et à écrire), on les instaure en maternelle. L'enfant est un grand questionneur, personne ne sait mieux s'étonner que lui, et l'étonnement est le premier pas vers la science philosophique, disait Aristote. Plus récemment, la productrice Cilvy Aupin a entendu Michel Onfray assurer que «tous les enfants sont philosophes, mais seuls quelques-uns le restent». C'est ce qui lui a donné l'idée de ce documentaire, Ce n'est qu'un début, réalisé par Jean-Pierre Pozzi et Pierre Barougier.

On y suit les «ateliers à visée philosophique» de Pascaline, institutrice dans une école d'application de Seine-et-Marne. «Les écoles d'application travaillent en lien avec les IUFM (Instituts de formation des maîtres) et s'inscrivent dans une dynamique de recherche et de nouvelles expériences», précise le dossier de presse. Sous l'influence des éducateurs, des psychologues et psychanalystes, la philosophie à l'usage des enfants tend à se répandre. «Cela existe déjà pour les classes primaires dans les pays nordiques ou en Angleterre, dit Jean-Pierre Pozzi, mais pas dans les maternelles, qui sont une spécificité française.»

 

«Grands moments de doute»

L'intérêt du film, plus pédagogique que cinématographique, est d'accompagner cette expérience pionnière, d'offrir un modèle aux instituteurs et un document aux familles. «Nous sommes partis à l'aventure, raconte Jean-Pierre Pozzi. Avec de grands moments de doute : on ne voyait pas la classe évoluer. Le film s'est construit dans le temps : c'est une donnée essentielle, ce qui va à contre-courant de la pensée dominante. Pendant la deuxième année, on a vu le chemin parcouru. »

Quel chemin ? «Au départ n'émergent que quelques individualités ; à la fin, il y a un groupe. Les enfants ont appris à respecter la parole de l'autre, ou à prendre la parole, ce qui n'est pas simple.» L'attention, la concentration font aussi partie des bénéfices. Et apprendre à se parler au lieu de se taper dessus n'est pas inutile.

Lorsque Pascaline allume la bougie («en maternelle, dit-elle, les rituels sont très importants»), les petits savent que la séance de philo est ouverte. On leur donne un mot, «liberté», «amour», «mort», ils s'en débrouillent ensemble, discrètement guidés par les questions de la maîtresse. On entendra de ces mots d'enfants qui ravissent les parents. Mais n'y a-t-il pas un risque de formater les esprits, surtout dans une société où l'argument d'autorité a vite raison de l'esprit d'examen ?

«C'est une grande question, dit Jean-Pierre Pozzi. L'apprentissage de la réflexion ne doit pas tomber dans le cours de morale. Il faut être très vigilant. L'apport des parents est primordial, les ateliers sont préparés avec eux.»

 

 



17/11/2010
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