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Revue de presse : Article dans Les Echos du 03/08/2011 : on peut se passer des laitages

Les produits laitiers sont dans notre culture le principal vecteur de calcium. Sauf allergie avérée, il n'y a pas de raison de s'en priver.

Le lait est un innocent breuvage qui cache bien son jeu. Pour s'en convaincre, il suffit d'une recherche sur Internet avec les mots-clefs « lait » et « santé ». Un déluge de références l'accuse d'être la cause de tous les maux : sinusites, asthme, hypertension, cancers, arthrose et même ostéoporose.

 

Après de telles lectures, les buveurs de lait, ceux qui ne crachaient pas sur un bon camembert ou une belle glace par temps chaud, en viennent à se demander s'ils ne sont pas, comme avec le tabac, en train de « nuire gravement » à leur santé. De nombreux sites disent bien qu'« on peut très bien se passer des laitages ». Qu'en est-il ?

 

« En matière d'alimentation, il est facile de décrier des produits, explique Jean-Louis Bresson, pédiatre et nutritionniste à l'hôpital Necker à Paris, responsable du centre d'investigation clinique. En revanche, apporter la preuve qu'un aliment est bénéfique est très difficile. En tout cas, dans notre culture, les produits laitiers sont un vecteur de calcium important. » Et une chose est sûre, pour construire nos os, nous avons besoin de calcium. « C'est pourquoi les jeunes filles, qui seront à partir de la ménopause plus exposées que les garçons à l'ostéoporose, ne doivent absolument pas en manquer, car elles constituent leur capital osseux avant 20 ans », poursuit le pédiatre.

 

Et après la ménopause, justement, manger beaucoup de laitages permet-il d'enrayer l'inexorable perte de masse osseuse ? Ce n'est malheureusement pas sûr. Les études concluantes comme celles de Jean-Philippe Bonjour, du service des maladies osseuses des Hôpitaux universitaires de Genève, publiées en 2008 et 2009 dans le « British Journal of Nutrition » portent sur un nombre de sujets trop réduit (une trentaine de femmes ménopausées dans les deux cas) et des périodes trop courtes pour que leurs conclusions puissent être généralisées à l'ensemble de la population. Au regard de la littérature disponible sur le sujet, il semble qu'une supplémentation en calcium et vitamine D n'ait au mieux qu'un effet modeste sur la prévention de l'ostéoporose et de la fracture du col du fémur. Après cinquante ans, mesdames, ce n'est donc pas tant pour cette raison que les laitages sont intéressants pour vous.

 

En effet, si les laitages fournissent 60 % de notre apport en calcium, ils sont aussi source de protéines et, à ce titre, jouent également un rôle dans le développement et l'entretien non seulement osseux mais aussi musculaire. Quant aux lipides du lait, longtemps voués aux gémonies, ils auraient eux aussi des effets bénéfiques. Selon Philippe Legrand, biochimiste à l'Inra (Rennes), certains de ces lipides contribuent à la fabrication d'acides gras indispensables à l'homme.

Effet cardiovasculaire positif

Ce sont notamment les acides gras qui expliqueraient les effets positifs des produits laitiers sur les maladies cardiovasculaires. C'est la conclusion d'une étude australienne publiée en 2010 dans le « European Journal of Clinical Nutrition », portant sur plus de 1.500 adultes de 25 à 78 ans qui ont été suivis pendant une quinzaine d'années. D'autres études, publiées en 2009 et en 2011 dans l'« American Journal of Nutrition », font état, elles aussi, d'effets positifs sur l'hypertension.

 

Il n'en demeure pas moins que l'allergie au lait de vache et l'intolérance aux protéines du lait existent. Elles touchent 2 à 3 % des enfants de moins de 1 an. « Des manifestations allergiques telles que des diarrhées, des vomissements et des troubles de croissance apparaissent dans les premières semaines de la vie », explique Jean-Louis Bresson. On remplace alors le lait par un hydrolysat de protéines. Généralement, l'allergie régresse spontanément avant 5 ou 6 ans.

On retrouve cependant des cas d'allergie chez le grand enfant et l'adulte, mais ils sont très rares, reconnaît Philippe Auriol, médecin allergologue libéral de Bordeaux. Dans ce cas, insiste-t-il, la suppression des produits laitiers doit s'accompagner d'une supplémentation en calcium. « En dehors de ces situations, il n'y a aucune raison de se priver de laitages », estime Jean-Louis Bresson.

 

Car trouver des aliments qui apportent les mêmes nutriments que les produits laitiers n'est pas simple. Les laits de soja, d'amande et autres « jus » végétaux n'ont de lait que le nom, et ne constituent en aucun cas un équivalent nutritionnel. Quant au régime eau minérale-amandes-sardines préconisé par Thierry Souccar, journaliste qui s'inspire des travaux de l'Ecole de santé publique de Harvard, il n'est pas forcément du goût de tout le monde. Surtout à haute dose. Car, pour atteindre le même apport en calcium qu'avec 100 grammes de fromage à pâte cuite type beaufort, il faut manger au moins 600 grammes de persil : essayez donc d'avaler 600 grammes de persil. Ou de manger des sardines tous les jours.

 

Mais quels sont, au juste, nos besoins en calcium ? De 800 milligrammes à 1 gramme par jour pour les adultes. Et, en France, le programme National Nutrition Santé recommande trois produits laitiers par jour.

CATHERINE DUCRUET


05/08/2011
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