ALPE74140

ALPE74140

Revue de presse : Article dans Les Echos du 19/09/2011 : Quand la science étudie l'efficacité des profs

« Entre 10 et 15 % des écarts de résultats constatés en fin d'année entre élèves s'expliquent par l'enseignant auquel l'enfant a été confié. » Le bilan dressé par le Centre d'analyse stratégique (CAS) dans une récente note d'analyse (*) confirme la réalité de « l'effet enseignant » mesurant l'influence des professeurs sur l'acquisition des connaissances. Plus personne ne conteste l'existence de ce paramètre, illustré par une formule à l'emporte-pièce : « Les professeurs ne sont pas égaux face aux étudiants. » Résultat, les recherches portant sur l'efficacité pédagogique se multiplient. A la clef, un objectif ambitieux et mal défini : « Accompagner les enseignants afin qu'ils développent leur capacité à faire progresser leurs élèves », tout en sachant « qu'une partie des différences demeure forcément inexplicable ».

Un cocktail subtil

Un fait semble admis par la majorité des experts : un bon prof est avant tout un animateur sachant entretenir l'attention de son auditoire. Contrairement à une idée reçue, la formation et l'expérience semblent jouer un rôle mineur et « c'est dans l'interaction avec les élèves que se joue l'essentiel des différences ». En fait, un enseignant efficace est un subtil cocktail entre talents personnels et techniques éducatives, ce qui pose de « sérieux problèmes d'analyse et de traitement statistiques ».

 

Autre surprise révélée par les enquêtes : le rôle du professeur est finalement plus important que l'établissement dans la réussite des élèves. En d'autres termes, « l'effet professeur » est toujours supérieur à « l'effet établissement ». Revers de la médaille, cette action s'efface dans le temps, mais les « impacts des enseignants successifs peuvent se cumuler ».

 

L'essentiel des recherches se déroule aux Etats-Unis. La fondation Bill & Melinda Gates a lancé en 2009 un programme destiné à mesurer sur le terrain scolaire la performance éducative des enseignants. Le programme MET (« Measures of effective teaching project ») est soutenu par une douzaine d'institutions, dont les universités d'Harvard et de Stanford. Il comprend l'enregistgrement de plusieurs milliers de cours qui serviront à détecter la « valeur ajoutée » des enseignants dans leurs classes. Près de 3.000 professeurs se prêtent à une opération balisée par de nombreuses grilles de notation, dont une partie sera remplie par les élèves eux-mêmes. Ce programme vise deux buts principaux : découvrir les professeurs qui excellent dans leurs disciplines et percer les secrets de leur réussite pour les transmettre aux autres.

 

Malgré son apparent souci d'objectivité, cette tentative de modélisation a suscité de nombreuses critiques au sein même du National Education Policy Center. Cette institution universitaire conteste la méthodologie sommaire du système de notation, assimilé à des jugements de type pile ou face.

 

En France, les syndicats ne veulent pas de ces pratiques. En 2008, le rapport Pochard évoquait timidement la nécessité d'évaluer la performance des enseignants. Sous la pression des syndicats dénonçant une « caporalisation visant à casser le statut des enseignants », ce document a été prudemment remisé dans la grande armoire des projets avortés par Xavier Darcos.

 

Dans une tribune parue dans la revue « Pour la Science », le mathématicien de l'université Paul-Sabatier à Toulouse Jean-Baptiste Hiriart-Urruty, résume ainsi la situation hexagonale : « On évalue les enseignants dans toutes les universités étrangères dignes de ce nom sans que cela ne souffre la moindre discussion ou réticence de la part des enseignants eux-mêmes. En France, on assiste à un démarrage difficile de l'expérience pour deux raisons essentielles : le manque manifeste d'une culture de l'évaluation et une crainte non véritablement fondée de la part des enseignants. »

Tout reste à inventer

Selon le CAS, ce levier mériterait une attention d'autant que « la portée d'une augmentation de l'efficacité pédagogique d'un enseignant est potentiellement supérieure à celle d'une diminution de la taille des classes ». Reste donc à trouver la bonne pédagogie pour introduire en douceur ces notions d'efficacité dans un milieu par principe réticent, voire hostile à l'évaluation.

 

Des recherches récentes montrent qu'en matière de science éducative, tout ou presque reste à inventer. Les travaux menés à l'Ecole polytechnique de Lausanne (EPFL) ont mis en évidence l'existence de petits groupes de neurones pyramidaux hébergeant les briques essentielles de la connaissance. Chez le rat, ces microcircuits neuronaux semblent contenir des connaissances fondamentales innées indispensables à la compréhension de l'environnement, et donc à la survie.

ALAIN PEREZ, Les Echos
Le prof idéal
Selon des sources américaines, l'efficacité pédagogique d'un professeur est plus liée à sa personnalité et ses méthodes d'enseignement qu'à sa formation initiale ou son ancienneté dans le poste. Parmi les critères qui améliorent la réceptivité des élèves figurent la structuration du cours, une certaine répétition des concepts importants, la manipulation par les élèves des nouvelles notions sous forme d'exercices et l'affichage clair des objectifs à atteindre. Les élèves progressent mieux quand les enseignants favorisent l'interactivité dans la classe et corrigent les erreurs sur un mode neutre (sans porter de jugement).
Ces critères subjectifs rendent la prédiction de performance d'un enseignant très difficile. Le projet MET, financé par la fondation Gates en cours aux Etats-Unis, vise précisément l'identification des pratiques éducatives efficaces, c'est-à-dire assurant la meilleure progression des élèves.
 

(*) « Que disent les recherches sur l'effet enseignant ? », accessible sur le site www.strategie.gouv.fr



19/09/2011
0 Poster un commentaire

A découvrir aussi


Inscrivez-vous au blog

Soyez prévenu par email des prochaines mises à jour

Rejoignez les 103 autres membres