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Revue de presse : Article dans Les Echos du 27/01/2011 : Apprendre l'anglais dès trois ans, une idée mal accueillie

L'idée du ministre de l'Education nationale Luc Chatel, d'enseigner l'anglais aux enfants dès trois ans a suscité des réactions allant du scepticisme à la franche exaspération, au moment où des postes d'intervenants en langues doivent être supprimés en primaire.

 

Dimanche, M. Chatel a déclaré qu'il comptait "réinventer l'apprentissage de l'anglais", suggérant un enseignement dès trois ans, grâce notamment aux nouvelles technologies, et mettant l'accent sur le développement des cours à distance et des séjours à l'étranger, à d'autres stades de la scolarité.

 

Pour l'instant, l'enseignement de l'anglais à partir de trois ans n'existe que dans quelques écoles maternelles privées et/ou bilingues.

 

Certains enseignants, comme le secrétaire général du principal syndicat du primaire (SNUipp-FSU), Sébastien Sihr, imaginent un tel apprentissage pour peu qu'il soit très ludique, à base de petites chansons par exemple.

 

Les spécialistes, comme le linguiste Claude Hagège, professeur au collège de France, ou Michel Morel, de l'Association des professeurs de langues vivantes (APLV), jugent néanmoins que c'est trop tôt pour un véritable enseignement.

"Trois ans me paraît trop tôt. La langue maternelle, les structures phonétiques et grammaticales ne sont vraiment en place que vers cinq voire six ans", a dit au Monde M. Hagège, qui préconise en revanche l'apprentissage des langues étrangères, et même de plusieurs, à partir de cet âge-ci.

 

Du scepticisme chez les spécialistes, on passe à l'exaspération chez les internautes : à titre d'exemple, l'article du site lemonde.fr consacré à l'annonce du ministre a suscité près de 250 réactions, un nombre inhabituellement élevé, et pour une immense majorité à tonalité critique.

Trois types de messages dominaient nettement : c'est de la communication de la part du ministre, c'est contradictoire avec les suppressions d'intervenants en langues étrangères, et mieux vaut bien apprendre le français en maternelle.

"Quelle duplicité ! On supprime les intervenants en langues étrangères dans le premier degré et on fait miroiter l'apprentissage à la maternelle. De qui se moque-t-on ?", a écrit par exemple un internaute.

 

Ces intervenants, souvent des locuteurs natifs des pays de la langue enseignée, vont être les premières victimes des économies pour la rentrée 2011 : 75 des 120 suppressions de postes prévues en primaire dans l'académie de Versailles, la plus grande de France, vont par exemple les concerner, ou 103 sur 120 dans celle de Créteil.

 

Au total, le départ de 1.000 intervenants est prévu en 2011, selon un document de Bercy.

Pour les syndicats, comme le SNUipp, l'annonce du ministre tient d'autant plus de "l'absurde" que "la généralisation" de l'enseignement de l'anglais "n'est pas achevée dans l'école élémentaire", où les élèves du CE1 au CM2 en ont normalement 54 heures annuelles depuis 2008.

 

"Au vu des chiffres avancés par le ministère, oui, tous les élèves ont ces 54 heures. Mais au vu de la perception du terrain, c'est moins sûr", a expliqué à l'AFP Guy Barbier, du syndicat SE-Unsa.

Si tous les professeurs des écoles sont désormais censés être concernés par cet enseignement, certains préfèrent mettre l'accent sur les fondamentaux (français et mathématiques), d'autres ne se trouvent pas à la hauteur.

 

"La qualité de la formation des professeurs des écoles est en effet différente suivant le cursus universitaire choisi, selon que vous ayez un master d'anglais ou que votre accent soit à couper au couteau", a commenté M. Barbier.

Par Emmanuel DEFOULOY


29/01/2011
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