Revue de presse : Article sur www.cafepedagogique.net du 30/03/2012 : La Grande Lessive : Une innovation qui fait le tour du monde
"Un vrai bonheur dans le collège". Yann, un collégien de 5ème, n'en revient pas. Ce jeudi 29 mars, la cour de récréation du collège Raymond Queneau (Paris 5ème) est envahie par des cordes à linge sur lesquelles sont accrochés pas moins de 5 000 bonhommes. Dix par élève. La Grande Lessive a encore visité le collège...
"La Grande Lessive repose sur le détournement d'une pratique familiale commune et incontournable. Le dispositif propose ainsi une version accessible de l'exposition, mais aussi de la pratique artistique", nous disait en 2007, à l'occasion de la première grande lessive, la plasticienne Joëlle Gonthier. "Il s'agit le jour venu d'étendre le matin une feuille de format A4 à l'aide de pinces à linges sur un fil tendu dans un lieu convenu. Un dessin, une photographie, un collage, une peinture... réalisés pour l'occasion de préférence hors de l'école seront accrochés par leur auteur qui signera au dos de la réalisation. Le soir, chacun reprendra ce qui portera désormais trace du regard porté par d'autres".
Le 29 mars, au collège Raymond Queneau de Paris, 5 000 figurines en papier ou en carton s'agitent sous le vent dans la cour du récréation. Des élèves ont recopié des personnages de série ou de dessins animés. Certains bonhommes portent des photos. On croit reconnaitre une mère ou une soeur. Certains sont totalement dessinés : un squelette, un animal. Tout un univers, celui des élèves, ondule au vent. Il y a aussi quelques bonhommes réalisés par le professeur. "Avec La Grande Lessive, les élèves peuvent montrer beaucoup plus facilement qu'en classe quelque chose d'eux qui va être regardé par les autres et non par le seul professeur", nous confie J Gonthier. "Ils découvrent que le regard porté transforme leur propre pratique".
Pratique sociale et crédibilité artistique
Yann, notre collégien de 5ème, est surpris. "Je ne croyais pas que ça marcherait". De fait il y a des milliers de bonshommes différents. Et les élèves se déplacent précautionneusement dans la cour de récréation pour éviter de faire tomber des bonshommes. Quand ça arrive, ils sont remis en place. Par terre un seul bonhomme a fini l'exposition avant l'heure. "Ca rend le collège vivant" explique Yann qui rit encore de la surprise des professeurs devant le spectacle donné par la cour. "Dans la classe, on a décidé d'accrocher ensemble nos bonhommes pour l'ambiance".
"A travers l'oeuvre collective qu'est la Grande Lessive, les élèves voient que le monde est grand et que chacun y a sa place", poursuit Joëlle Gonthier. "C'est la différence avec une exposition de fin d'année où on sélectionne les meilleurs et on élimine les autres. Le projet est né d'un besoin social d'être ensemble. Mais les gens ont aussi besoin d'exprimer quelque chose d'eux en relation avec les autres. Aujourd'hui, la Grande Lessive a trouvé sa crédibilité artistique. Au collège, les élèves ont travaillé sur le rapport au corps et à l'imaginaire, comment concrétiser quelque chose qui me ressemble et qui se détache de moi".
Une multinationale française
Depuis 2007, une dizaine de lessives ont eu lieu et l'événement a grandi au point de devenir mondial. Ce 29 mars, un millier d'établissements scolaires, de crèches, de places de village, étendent leurs cordes à linge. La Grande Lessive s'est levée à Tahiti, est passée à La Réunion, à Madagascar, à Beyrouth puis à Saint Louis du Sénégal et Casablanca. Le 29 dans l'après-midi, elle arrive au Canada et aux Etats-Unis. La Grande Lessive a suivi les câbles de la toile et des milliers d'acteurs se sont emparés du concept au point que c'est probablement l'événement artistique français le plus exporté. La force du concept est telle que sa diffusion se fait sans publicité, sans budget grâce à la fidélité des acteurs qui relaient ce qu'ils vivent lors des Grandes Lessives.
Innovation : Quelle place pour le bottom - up ?
"Ni crédit, ni subvention", explique Joëlle Gonthier. Ni soutien officiel. Venue du terrain, la Grande Lessive bénéficie des encouragements de l'académie de Paris, du soutien de la principale du collège, N. Civiale, de son adjointe V. Haueur et de la bonne volonté de l'équipe pédagogique du collège Queneau. Au-delà, elle profite de la complicité de tout un réseau de centaines de chefs d'établissement, d'inspecteurs, d'inspecteurs d'académie, de collectivités territoriales. Mais à un quart d'heure de l'Unesco, où se tiennent les "Journées de l'innovation", cet événement géant n'est toujours pas reconnu par le ministère de l'éducation nationale. Cette grande innovation pédagogique mobilise depuis 5 ans des milliers de personnes dans une certaine indifférence officielle.
François Jarraud
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